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[Vasavoirsi]

A l’école. Dans la cour de récréation. Les autres enfants qui jouent. Le ballon qui roule. Les garçons qui courent après. Les bicyclettes jaunes qui dérapent. Le sable dans les chaussures. Le sable sur la tête. Le sifflet qui retentit. La maîtresse qui gronde.
- Non Paul ! On ne tape pas sur la tête de Gustave avec un râteau ! Même s’il t’a mis de la terre dans la culotte.
Les petites filles qui sautent dans la marelle. Un. Deux. Trois. Raté. Le pied a dévié. Il faudra recommencer. À ton tour Suzanne. Suzanne, elle, elle atteint la lune.
Émilie, elle, y est déjà depuis longtemps. À côté de colombine et de pierrot, assise sur un banc, les pieds se balançant. À côté, une porte vitrée entrouverte. La classe de musique de Monsieur Stanislas. Un air de musique dans l’air. Les notes qui s’envolent et qui l’atteignent. Elle n’ose pas bouger. C’est tellement joli. Elle a peur d’effrayer les notes. De les voir partir. Elle aimerait bien fermer les yeux, mais Madame la Directrice lui a déjà demandé si elle était malade. Elle a échappé de peu à l’infirmerie.
- Non Madame la Directrice, je ne suis pas malade. J’écoute seulement Monsieur Stanislas.
Madame Dupin avait répondu que ce n’était pas bien d’écouter aux portes. Et elle avait refermé celle de la salle de musique. Et lui avait conseillé d’aller jouer avec les autres enfants. Que ce n’était pas bien de rester assise sur un banc. Que la cour de récréation c’était fait pour se dépenser. Afin de rester sage en salle de classe après. Et d’écouter la leçon. Elle songea à sa propre salle de classe et aux hurlements des enfants et soupira.
Mais heureusement que les anges veillent toujours. La musique s’était arrêtée. La chevelure frisottée du professeur était passée dans l’entrebâillement et il avait demandé à la cantonade de laisser sa porte ouverte. Parce qu’il détestait être enfermé. Et que la musique devait vivre libre ! Que c’était quand même un monde de ne pas pouvoir faire ce qu’on voulait. Lui voulait garder sa salle ouverte !
Pour la première fois depuis longtemps Émilie avait souri. Elle s’était dit qu’il lui tardait d’être grande pour avoir le droit d’être dans sa classe. Que les autres ne savaient pas leur chance ! Il avait repris la musique. Depuis le début. Il jouait du piano. Elle connaît le morceau. Elle le cherche dans sa tête. Que c’est bête, elle n’a pas pensé à prendre sa boîte à secrets aujourd’hui. Elle se dit que toutes les notes sont à jamais perdues. Cela la rend triste.
Peut-être que si elle lui demande gentiment, un jour, il pourra rejouer cet air juste pour elle. Pour qu’elle attrape les notes. Cette fois-ci, elle n’oubliera pas sa boîte.
Elle se rappelle le morceau. Elle est heureuse de se souvenir du nom du monsieur qui jouait. Il ne faut pas oublier le nom des compositeurs. Oui. Cela s’appelle des compositeurs. Il ne faut pas les oublier parce qu’ils sont des magiciens. C’est encore plus fort de faire sortir d’aussi jolie mélodie d’un piano qu’un lapin d’un chapeau. Et puis un lapin, ça ne sert à rien. Ça court et après ça ne se rattrape plus. Sa grand-mère, elle en a plein. Sûrement pour prendre de l’avance au cas où ils se sauveraient tous en même temps. Ils se sauvent toujours. Quand elle se réveillait le matin à la ferme, la maison du lapin était vide. Il en manquait au moins toujours un. Elle demandait la raison à sa grand-mère. Elle lui parlait toujours de civet. Émilie ne savait pas ce que c’était un civet. Mais elle voyait les yeux illuminés de sa grand-mère. La petite moue gourmande. Alors, elle se disait que le civet cela devait être bien. Sans doute, que les lapins avaient trouvé le chemin du pays du civet. C’est leur pays merveilleux à eux. Elle, elle voudrait juste trouver celui des notes.


Corinne

[Artemisia]

Ben tu vois, j'étais en train de cuire ma confiture de mirabelles, avec les mirabelles du jardin, et pendant que ça mijotait, j'ai lu ton texte.
Ben j'ai failli oublier ma bassine sur le feu...

Ton histoire est prenante.

C'est palpitant de suivre chaque personnage dans son monde intérieur. L'histoire se met en place et on découvre tout un univers.
Chopin... c'est chouette.

Non, pas d'inquiétude, la confiture n'a pas brûlé.

Ça m'apprendra à faire plusieurs choses en même temps...

Artemisia

[Vasavoirsi]

Ma grand mère faisait des confitures aussi. J'adorais quand elle les faisait. Cela embaumait toutes les pièces. Jamais de mirabelles. Je ne connais pas. C'est bête à dire mais ton message et ton histoire de confitures m'a donné un petit sourire dans ma journée bien triste.
Merci Artémisia.