françois sorin

beauté es tu celle que j'croyais
quand les yeux miroirs dégeulants
je m'en allais mutin et mutant
défier l'aube délirant comme jamais

je te croisais ou je l'ai cru
tranche de chair ondulation
sur le trottoir en rouge crépon
remonter l'aube à moitié nue

beauté viande saoule c'est moi que j'suis
à demi lune à moitié mort
c'était pas l'aube c'était l'aurore
c'était trop tard et puis tant pis

de l'enfer je reçois des lettres éventrées
qui a lu avant moi le message de l'abime?

qui est il ce salaud pour ouvrir mon courrier?
partager mes secrets et me prendre pour victime?
où est il ce pourri, ce bourreau délicat
qui prend soin de poser sur mes bulletins intimes
le cachet de ses lèvres et l'étreinte de ses doigts?
qui est il cet enfant de putain,
si ce n'est pas le mien?

si ce n'est pas le mien, il n'existe pas
et, si je reçois de l'enfer des lettres éventrées
c'est le vent qui les a balancées, déchirées
s'amusant des pages vides, des pages blanches
que l'enfer m'adresse chaque jour, tout le temps

et je mange les murs dans cette chambre sans fenêtres
et j'épingle au plafond les papillions de nuit
je recherche l'impact et le point de rupture
je deviens chaque fil, chaque point de suture
me voilà solitude dans le fond des bouteilles
me voilà solliloque, nourissant le silence
la reine des connes et je peux le jurer
la reine d'un homme au royaume fermé