A l’heure espagnole du déjeuner, conte nouvelle
#1
Posted 22 August 2005 - 10:30 AM
C’était l’heure espagnole du déjeuner entre 13 et 15 heures.
Mes yeux se posèrent, au milieu de la rue, sur deux facteurs en grande conversation. Ils portaient en bandoulière de grandes sacoches en cuir brun clair. Vides ou presque… C’était la fin de la tournée, alors autant dire qu’elles s’étaient allégées de leur contenu postal, mais l’un des deux hommes avait des feuilles de laitue qui dépassaient de la sienne mal fermée. Visiblement il venait de faire des courses. Il avait dû finir plus tôt que son collègue qui, bien que sa sacoche fût vide, tenait encore une lettre dans ses mains. Celui-ci la montra à son compagnon. Ils éclatèrent de rire (enfin je crois, tant mon souvenir est ténu depuis le temps…). Et, en deux, trois mouvements, le détenteur de l’enveloppe la déchira. Les morceaux, jetés en l’air, voltigèrent un instant puis retombèrent sur le sol. L’individu n’avait même pas pris la peine de les garder pour les mettre dans une poubelle.
Je n’accuse pas les facteurs espagnols en particulier d’avoir ce type de comportement. Non, je pense que partout dans le monde il y a des postiers ripoux, si on peut les appeler ainsi. J’ai eu aussi ma part de courriers perdus, tant en France qu’en Espagne. Et c’est bien malheureux d’avoir nos relations avec les autres ainsi malmenées, leur destin mis à la disposition des mains de tiers qui ne nous connaissent même pas.
J’ai souvent pensé à cette lettre, et je me suis demandé quels purent être son histoire et l’effet produit par sa destruction sur l’expéditeur et le destinataire.
***
Jordi, Catalan comme son prénom l’indique et vivant dans une petite rue perpendiculaire aux Ramblas à Barcelone, écrit dans sa chambre à son amie.
Mari Carmen a son âge, 17 ans, et habite à Madrid dans la rue Padre Damián. Un quartier aisé que peut se permettre son père qui est PDG dans l’industrie pharmaceutique.
Quand ils ne sont pas ensemble, Jordi et elle s’écrivent. Jamais ils ne se téléphonent, les parents de Jordi n’ont pas de ligne chez eux. Ils ne sont pas assez riches pour cela. Mais cela ne gêne pas leur fils, qui est disposé à travailler dur pour payer les études d’avocat dont il rêve tant. Puis il fondera un foyer et sera heureux. Ça aussi il le veut !
Cela fait longtemps que la famille de Mari Carmen passe les vacances d’été sur la Costa Brava dans la maison de ses grands-parents maternels.
Les jeunes gens se connurent sur une plage il y a cinq ans. Et depuis ils s’y retrouvent chaque mois d’août. C’est ainsi que peu à peu ils apprirent à se connaître et à s’aimer.
Si Jordi a tardé à répondre aux dernières nouvelles de la jeune fille, c’est qu’il a eu une décision importante à prendre, et ce n’est pas simple. Il écrit sur son bureau d’étudiant, sous la lumière tamisée de sa petite lampe au corps souple, incurvé juste dans l’axe du papier à lettre posé devant lui. Il y met tout son cœur et la missive s’allonge…
A la fin, il la relit en s’attardant sur les mots, comme s’il voulait ne pas l’oublier alors qu’il n’en a aucun double. Ce n’est pas comme avec les lettres de son amie, gardées dans le tiroir de son bureau. Il a tout le loisir de les lire, elles, encore et encore.
Il met les deux feuillets qu’il vient d’écrire dans une enveloppe, libelle l’adresse dessus, puis se lève et sort acheter un timbre. Il le colle et envoie le tout.
Mais Mari Carmen ne recevra jamais la belle lettre de son ami. Et le jeune Catalan brûlera son âme en vain d’attendre la réponse de sa bien-aimée à sa demande de fiançailles, car telle était la décision si dure à lui communiquer. Et tandis qu’elle se lassera de la langueur de cette correspondance entre Catalogne et Castille, la jeune fille se tournera vers les yeux tendres de Pablo, un garçon de sa classe au lycée qu’on disait coureur. Ce que Mari Carmen ignorait jusqu’alors, ne le voyant même pas tant son esprit était figé sur Jordi.
***
Voilà ce qu’un goguenard facteur et peu scrupuleux, pressé sans doute de déjeuner avec son ami collègue (de la salade qui sait…), aurait fait en déchirant le dernier courrier de sa tournée, briser un couple en devenir !
Bien sûr, moi témoin, j’aurais pu descendre dans la rue et ramasser les morceaux de papier, relever l’adresse du destinataire et les lui porter. Il aurait, en les assemblant, pu lire la lettre, et ainsi la sentence du facteur aurait été cassée. Mais, hélas, je n’ai pas eu la présence d’esprit de le faire et le regrette amèrement maintenant que j’y pense…
Enfin, j’ose espérer que, si Jordi et Mari Carmen avaient existé, ils se seraient de nouveau rencontrés sur la plage à Barcelone l’été suivant. Ils auraient parlé de la lettre et compris qu’elle s’était égarée. Et, si Mari Carmen, lassée de son charme, avait quitté Pablo, alors tout aurait pu recommencer entre les deux adolescents amoureux.
#2
Posted 23 August 2005 - 12:54 PM
Amicalement,
Béa
#3
Posted 24 August 2005 - 02:03 PM
depuis le 22 août , sans réactions....DAMNED !!
moi je prend le truc à bras les ailes,
et je vais lire....
..j'ai vu que ça commençait à Madrid......cool !!
.
#4
Posted 24 August 2005 - 02:25 PM
De l'indignation à l'émotion
C'est de la poësie . . . !
N'en doutons pas !
#5
Posted 24 August 2005 - 02:45 PM
Qu'allez-vous chercher là ?
Votre histoire a le poids de la vie, du réel.. ce sont les choses simples qui sont comprises de tous et devant l'evidence on ne peut qu'applaudir.
Vous avez bien narré une tranche de vie, de ces petites choses qu'on balaye trop souvent d'un haussement d'épaule mais lorsqu'elles nous arrivent..
Amitiés.
:-))
#6
Posted 24 August 2005 - 03:00 PM
mais non Béa, tu vois, ça marche........t'inquiète !!!!
.
#7
Posted 24 August 2005 - 04:28 PM
depuis le 22 août , sans réactions....DAMNED !!
moi je prend le truc à bras les ailes,
et je vais lire....
..j'ai vu que ça commençait à Madrid......cool !!
.
Mais c'est sympa, Ptitcanard, de l'avoir repêché ce texte voué même à sa disparition. J'allais le supprimer, va savoir pourquoi... Vraiment j'avais cru que quelque chose clochait, mais je ne voyais pas quoi !
Merci beaucoup à toi, et salut à ton papa :wink:
Amitiés,
Béa
#8
Posted 24 August 2005 - 04:29 PM
De l'indignation à l'émotion
C'est de la poësie . . . !
N'en doutons pas !
C'est gentil de le dire. Merci Kékun :wink:
Amitiés,
Béa
#9
Posted 24 August 2005 - 04:32 PM
Qu'allez-vous chercher là ?
Votre histoire a le poids de la vie, du réel.. ce sont les choses simples qui sont comprises de tous et devant l'evidence on ne peut qu'applaudir.
Vous avez bien narré une tranche de vie, de ces petites choses qu'on balaye trop souvent d'un haussement d'épaule mais lorsqu'elles nous arrivent..
Amitiés.
:-))
Merci, Roseau, de me conforter que ce n'est pas trop mal. Et aussi de résumer très bien le message que j'ai voulu introduire... :wink:
Amitiés,
Béa
#10
Posted 24 August 2005 - 04:33 PM
mais non Béa, tu vois, ça marche........t'inquiète !!!!
.
Merci Buchmann :wink:
Tu sais, j'adore les Simpsons et ton avatar
Amitiés,
Béa
#11
Posted 24 August 2005 - 05:24 PM
Amitiés
#12
Posted 24 August 2005 - 05:51 PM
Amitiés
Cependant, je tiens à te remercier pour ton commentaire, quoique ce sera sans sourire pour moi. Je n'en ai pas le coeur à présent. Je suis triste. Et je pense vous laisser un temps. Il y a des mots qui sont durs à "avaler". Et bien évidemment, je tiens à arrêter de produire ici ma merde du moins pour le temps qu'il me faut pour me remettre de ce type de vilain et gratuit coup. Il y a ici franchement des gens bien méchants, à moins que ce soit moi... Je m'en vais donc pour un temps illimité puisque la méchanceté doit primer ici.
A une autre fois,
Amitiés à toi, Comte,
Béa
#13
Posted 24 August 2005 - 06:03 PM
Tu ne peux pas accorder autant d'importance à ce commentaire... prends-le d'où il vient !
et pour continuer dans le même style : laisse pisser !
(je stoppe ici pour continuer ailleurs)
Bisous,
Armoni @}-'--,---
#14
Posted 24 August 2005 - 06:06 PM
Ne t'arrête pas aux commentaires de Lapsus, dans tous les Royaumes, il y a des bouffons.
Pour revenir à ton poème en prose, j'ai bien aimé l'accroche "la lettre déchirée" et "le morceau de salade qui dépasse de la sacoche".
#15
Posted 24 August 2005 - 06:06 PM
Je t'embrasse
Laurence
#16
Posted 24 August 2005 - 06:10 PM
Qui t'a appris la politesse ? :shock:
Si tu n'as que ça à dire... un conseil : tais-toi !
Armoni
#17
Posted 24 August 2005 - 06:24 PM
je n'avais pas encore eu le temps de lire ta nouvelle. Elle me plaît et ton écriture est toujours aussi fine et d'une lecture agréable et à l'orthographe impeccable comme toujours.
Je n'entrerai pas dans les formes de jugement de valeur de certains, tu le sais bien. Je vais essayer d'apporter un regard constructif à ma lecture.
Il me semble que ta nouvelle gagnerait à être structurée différemment. Je m'explique. Je débuterai par la rédaction de la lettre de Jordi à Carmen en laissant planer le doute sur une éventuelle réponse positive... (un peu de suspens, tu connais très bien ça). Puis je mettrai en parallèle l'anecdote des deux facteurs... avec ce qu'elle t'amène à développer comme appréciation personnelle sur ta présence à Madrid et sur l'action "postale". Pour terminer par les suppositions sur une rencontre, l'été suivant, de Jordi et Carmen et en laissant en suspens ce qui arrivera... Qui sait si tu n'auras pas envie d'écrire une suite...
Ce n'est qu'une suggestion dont tu feras l'usage que tu voudras.
Mais j'ai aimé l'originalité de la situation, sache le. Tu as un réel talent, et ça fait déjà longtemps que beaucoup ici le savent.
Bisous
Quercus
#18
Posted 24 August 2005 - 09:33 PM
Quand au fond, he bien je dois dire que cette histoire ma touché car elle me rappelle que moi aussi quand j'étais ado j'écrivais des lettres et que... enfin bref :roll:
Marygrange, prends le temps de digérer ce coup si tu en as besoin, mais aprés 5671 messages, je suis sur que tu ne tarderas pas a donner de tes nouvelles. :wink:
bon maintenant y fo que je poste mon poéme...
amités a tous
#19
Posted 25 August 2005 - 12:10 AM
A bientot...
#20
Posted 25 August 2005 - 07:20 AM
POURTANT
Outre ses brûlots indignes (verouillés pour qu'on ne puisse les commenter, courrageux non ?) Lapsus écrit des textes vraiment bons, originaux, fulgurants pour certains (voir ses blogs).
Alors qui est Lapsus ? Docteur ou Mister ? Il préférerait sans doute Gainsbourg-Gainsbarre. Peu importe en fait, lorsque son esprit s'embrume dans des réflexions oiseuses, soyons patient, il sait faire beaucoup mieux.
Votre sujet est bon et votre façon pas mauvaise. Relisez votre texte dans quelques semaines et ses maladresses vous apparaitrons. A bientôt.
#21
Posted 25 August 2005 - 07:43 AM
#22
Posted 25 August 2005 - 07:43 AM
Je pense que mon idée de le supprimer, quand j'ai noté son impopularité, était la meilleure. Mais au lieu de cela, je l'ai remonté demandant bêtement de me dire ce qui clochait. Ce fut une grande erreur puisque ainsi je me jetais dans la gueule du loup, je veux dire des critiques vulgaires comme j'en ai reçues. Hier, quand je suis revenue sur le site, j'étais prête à supprimer et mon commentaire de remonte et le post. C'est possible étant seule à y avoir écrit quelque chose. Mais Ptitcanard l'avait remonté et là je ne pouvais plus éliminer le post. Cela dit, c'était bien intentionnellement, et je ne peux lui en vouloir.
Face à tout ce qui s'en est suivi et les propos qui m'ont fait mal, vraiment, je demande qu'on oublie ce post et qu'on arrête de le commenter, donc je demande au modérateur de le verrouiller. Oui, en quelque sorte je m'auto-censure. Et alors ? Si vous voulez en parler, même m'incendier pour certains, faites-le au salon de discussion.
Il est possible que je retouche ce dit texte. Cela dit, je pense que je ne le republierai pas, ou dans longtemps, à une époque où il n'y aura plus le risque de se faire descendre comme je l'ai été ici. Mais je ne crois même pas que je le ferai, au vu du dégoût que j'en ai aujourd'hui. Je corrigerai et le publierai, certes, mais ailleurs.
Je remercie donc le modérateur de bien vouloir verrouiller ce post. Et à tous ceux qui me soutiennent, merci encore !
Amitiés,
Béa
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