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Nouvelle De L'homme Seul


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Posted 26 October 2006 - 02:10 AM

La nouvelle de l'homme seul



Le vent. Il n’y avait aucun vent sur cette île, en hiver le lac souffrant comme un statue n’avait droit qu’à l’oiseau moqueur. Les arbres ? Si peu, un chêne, quelques pins brûlant en été sur le chemin des salamandres, des cactus. Les rivières allègres zèbrent la haute montagne dont il est dit que la cime est théâtre de dieux grecs au chômage. Zeus cultive un champs de houblon protégé des mortels par une sphère de brumes et de nuées, Athéna nue apostrophe les virils dragons chromatiques aux sexes d’émeraude, on raconte qu’Apollon fut transmuté en pierre tombale pour avoir trop convoité une habitante du village hurlant.

Il n’y avait plus d’orages, et tout semblait perdu…

Le seul homme qui subsistait dans ce désert des plans marchait sans but, afin de vivre. Ou peut être vivait-il afin de ne plus avoir de but. Personne, pas même le plus philosophe de tous les philosophes, n’aurait pu trancher entre ces deux alternatives. Entièrement vêtu de blanc, porteur de deux 6 coups, un sabre napoléonien à la ceinture. (Nu dans la tête mais ceinturé de haine, voilà quel fardeau traînent certains vagabonds)
Savait-il que le chêne pouvait le délivrer de son errance ? En tous les cas, le chêne resta planté seul sans jamais voir passer les yeux éteints de l’homme mobile. Triste et majestueux, il enfermait tant de révoltes mortes… et l’odeur de la pluie…

Le seul homme erra donc. Il avait jadis un nom ; mais un soir le vent l’avait emporté sans revenir. Le vagabond et l’île étaient tombés sous le coup de la même malédiction, un soir gris où les dimensions réfléchissaient à l’avenir.

La couleuvre était sage et parlait le langage de l’humus. Seul à conserver son statut, l’humus lui tremblait en toute saison, alors la couleuvre tremblait sans connaître le repos. Voilà qu’un jour le seul homme croisa son chemin… elle se jeta dans son œil droit pour y transférer son mal et l’homme trembla à son tour et vit des choses qu’il ne voyait pas, les dimensions se distordaient, il comprit que le chaos engendrait le chaos, qu’il existait un but dans ce chaos, comme une lumière, guidant ses pas…
Il gravit des collines de suie, des collines de lave et atteignit la caverne aux salamandres. Priant pour la pinède calcinée, il saisit son sabre et perça l’obscurité dégoûtante des lieux, les salamandres vinrent à sa rencontre… La couleuvre-dans-son-œil-droit leur parla, et aidée par le reflet charbonneux de l’iris-réceptacle, modula sa plainte en un chant hypnotique, plus puissant qu’aucun sophisme politique de place publique.
Alors les salamandres s’inclinèrent, reconnaissant la venue de leur maître, et incantèrent la clé du Reptile selon les anciens rite du FEU de la LAVE et du VAUDOU. L’homme sans nom la plongea dans son œil vacant, brûla ardemment, et accéda aux multiples et perverses visions de son intérieur. Le fait est qu’il admirait ses vaisseaux sanguins, suivait leurs connexions, accédait à la cartographie de son être, dirigeait de son propre chef le battement de son cœur.

Pourtant il sentit qu’il n’était pas complet. Il manquait le lien entre ses deux nouvelles visions. Ainsi avait-il pour le moment pleinement conscience de l’infini mais ne pouvait-il le maîtriser, et son corps de mortel souffrait des tourments divins. Il parcourut les landes à quatre pattes, agonisant les jours de soleil. Il s’enfonça dans les plus glauques marais, il se réfugia dans des forêts où toute vie avait cessé. Sa déprime était telle qu’il se mangeait les côtes, s’arrachait les cheveux par poignées qu’il jetait dans la tourbière, s’écorchait les chairs, son sang gouttant sur la mauvaise herbe. Et malgré tout, il ne se résigna pas à faire usage de l’un de ses deux revolvers. Aucune balle n’approchera de mes tempes, je ne mourrai pas à moins que la mort ne vienne me chercher, pensait-il. Un soir qu’il n’en pouvait plus, il tomba la tête la première dans une tourbe d’une radiance étrange, indécise entre l’or et la rouille. Voilà une chute qui lui fut pour le moins salvatrice… car cette tourbe n’était autre que le gosier putride du plus ancien des dragons chromatides.

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