La Gifle
#1
Posted 21 July 2006 - 10:22 AM
Je te regarde. Tu me regardes. Tu es là devant moi. Hostile. Je me demande ce qu'il se passe. Je ne bouge pas. Aucun geste. Les pensées suspendues. Mon regard interrogatif. Je vois. Ton visage est déformé par la colère. Par la haine. Tes lèvres tremblent. Tes yeux électrisent, court-circuitent. Tout passe dans l'air. L'air se raréfie. L'air m'étouffe. L'air prend tout, s'accroche et griffe tout. Arrache. Tout.
Il ne veut plus rien lâcher. Ne plus rien laisser. Il montre son vrai visage. Ouverture de bouche grimaçante. Rictus. Laisse échapper du dioxyde. Souffle de carbone en suspension que je n'attrape pas. Que tu attrapes toi. Venin acidulé. Injection éthérée. Tu hurles. Tu cries. Tu m'insultes. Tu craches. Pantin désarticulé. Automate. La main qui se lève. Le geste décomposé. La parole devenue folle.
Je n'ai pas bougé. Je prends la gifle. Je la reçois violement. En plein visage. Nos regards ne se sont pas lâchés. Ne se sont jamais perdus de vue. Je ne baisserais pas les yeux. Je te regarde m'humilier. Me prendre ma dignité. Je te vois me voler. Me violer. M'arracher à ma force, me déshabiller dans ma fragilité. Tu me prends de haut. Tu attends mes mots. Mes larmes. Tu attends ma chute. Mes genoux à terre. Ma main effleurant ta jambe. Ma bouche hurlant l'impuissance.
Mais je n'ai pas bougé. Je ne bougerais pas. Jamais. Tu me fais pitié. Tu peux bien encore me frapper. Me cogner. Me tabasser. Faire couler mon sang. T'en imprégner. Le sucer. Le lécher. Te marrer. Rire aux éclats. Eclats de voix. De verre. Me couper. M'achever.
Mais tu ne pourras pas. Tu ne le feras pas. C'était ton premier geste. Un geste de trop. Pas assez.
Tu es lâche. Je sais que tu es lâche. Tu es de ceux qui frappent sans vrai combat. Déserteur. Tu prendras toujours la fuite. Tu n'assumes pas. Tu as peur. Tu ne sais pas comment me prendre. Tu ne l'as jamais su. Tu te crois si intelligent. Tu pavoises. Tu t'étales. Tu te répands. C'est mielleux. C'est gluant. C'est visqueux. On s'extasie sur toi. On te complimente. Tu aimes. Oh oui ! Que tu aimes. Tu en redemandes. Tu te montres encore plus. Mais tu montres qui ? Tu montres quoi ? Tu n'es rien. Tu as perdu tes émotions. Tu n'es qu'un automate. Un fantôme qui pavoise dans les allées sombres. Qui claque les portes à grands coups de chaînes. Qui hurle sans écho sa peine. Tu es seul. Tu ne te réponds qu'à toi-même. La gifle, elle était pour toi.
N'est ce pas ?
#2
Posted 21 July 2006 - 05:09 PM
bienvenue !
#3
Posted 21 July 2006 - 05:35 PM
#4
Posted 21 July 2006 - 06:08 PM
bienvenue !
Merci à toi Eden. Enchantée.
#5
Posted 21 July 2006 - 07:52 PM
Bienvenue,
balila
#6
Posted 21 July 2006 - 08:11 PM
et ce final qui interpelle...
bienvenue
henri
#7
Posted 22 July 2006 - 11:47 AM
Bienvenue,
balila
C'est vrai que je ne fais guère attention à la nombreuse ponctuation de mes textes. Je suis le rythme d'une composition musicale toujours et les phrases sont les conséquences immédiate de l'émotion ressentie. Je te remercie pour ta bienvenue. Heureuse aussi de trouver un forum où on peut s'exprimer librement de notre passion commune pour les mots et la musique.
et ce final qui interpelle...
bienvenue
henri
Bonjour henri,
Oui là j'écoutais un morceau avec un rythme cognant et essouflant. Reprise immédiate des notes à peine descendues. Merci à toi.
Au plaisir de te relire.
#8
Posted 22 July 2006 - 05:48 PM
et poignant,
les phrases très courtes donnent
un rythme syncopé,
qui colle parfaitement
au fond du texte.
Artemisia
#9
Posted 22 July 2006 - 06:35 PM
#10
Posted 22 July 2006 - 07:05 PM
#11
Posted 22 July 2006 - 07:11 PM
#12
Posted 22 July 2006 - 07:16 PM
Si tu veux, je peux te filer pour 7 euros de gifles.
#13
Posted 22 July 2006 - 07:19 PM
#14
Posted 22 July 2006 - 08:04 PM
Il me reste Harpagon, Labagru ou Cassecouille.
#15
Posted 22 July 2006 - 08:09 PM
[...] effacé par moderateur
#16
Posted 23 July 2006 - 10:06 AM
comme le mot de trop...
Et il est des mots qui font mal.
#17
Posted 07 August 2006 - 07:50 PM
La rougeur sur la joue s’estompe. Le temps reprend ses droits. Les vies continuent d’évoluer. Les scènes changent. Les personnes sont encore là. Evitant de croiser l’instant qui reste en suspension.
Et, quand elles se regardent, les yeux chutent, ne fixent pas, basculent. Une seconde suffirait. Revoir l’humiliation. Peut être entendre pardon.
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