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[Alain31]

Les premières violettes,
les pieds dans la flaque d'eau,
le vent qui soulève les cheveux, les branches des peupliers et les crinières des chevaux,
les nuages rapides et les giboulées drues,
la mare aux têtards et les grandes salamandres jaunes et noires des fossés humides,
la fraise cachée derrière la feuille et son crapaud tranquille aux yeux d'or,
les cerises en boucles d'oreilles,
les papillons pressés qui courent d'une fleur à l'autre et ces deux-là, bleutés, qui se content fleurette et se laissent emporter par le vent chaud et parfumé,
la chevelure longue de la charrette de foin tirée par les boeufs aux visages masqués de fougère,
les couchers du soleil qui salue dans une dernière flamme rouge,
les hannetons le soir et les chauves-souris,
les mots doux des grands ducs et le souffle de l'effraie, mêlés aux miaulements des chevechettes,
les chiens qui se répondent à travers les vallées,
les arbres nus qui perdent la dernière feuille en tremblant,
le bonhomme de neige dans le pré où les rires accompagnent les luges,
les onglées douloureuses au-dessus du fourneau et les lèvres gercées,
et le verglas caché et le froid qui s'acharne.

Un rouge-gorge transi dans une main tremblante,
un vol de maigres grives pattes-noires, qui creusent éperduemment la neige de pommier en pommier,
que je m'applique à suivre pour trouver quelquefois des pommes que je leur vole,
une trace de pas d'un lapin de garenne mêlée à celle d'un renard,
la glace épaisse de l'étang et là, sur le bord, le renard allongé, mort.
Le vent froid taille les oreilles à coup de fouet,
et cette pâle lumière mauve, filtrée par le grésil, qui fait scintiller quelques épines de givre sur les aiguilles d'un genevrier.
Aucun autre bruit que le sifflement du vent et le crépitement sec du grésil sur la neige gelée.
Pas même l'appel lugubre d'un corbeau perdu.
Les heures poussent les heures et le soir qui s'installe dévore encore quelques degrés.
Aucune trace de vie alentour, ni ce rouge-gorge mort dans ma main, ne dérange mon imagination.
Une chaumière au loin, sa cheminée qui fume et dans l'âtre où crépitent quelques tisons de chêne, juste au-dessus des flammes où pend la crémaillère, une marmite en fonte qui répand son fumet et le chien qui s'étire auprès des cendres chaudes et mes mains qui se frottent ou qui se frotteraient et qui frottent mes yeux où gèlent quelques larmes.

[Gnou]

Tout ça est en vente au magasin RUSTICA
ou dans les livres de Philippe Delerme.

Primesautièrement,
Le Berbolgru
from
Flatulence Mistigri
&
Trompette Sauvage durement Ramonée

[Vincent Z]

Pour moi ça fonctionne très bien.
Bravo.