TIC TAC, TIC TAC…
L’équilibre continuel de l’horloge du salon vient rythmer le silence de la maison…
TIC TAC, TIC TAC…
…d’un spasme régulier sans option sur le temps qu’elle laisse s’évider.
Allongé, les doigts noués sur le bord de son lit, il regarde les raies de lumières balayer son plafond, à travers l’ouverture de ses volets en cette fin de nuit.
Il ne fait pas froid ici, il ne bouge pas, pourtant son souffle est court et l’engourdissement dans ses doigts.
TIC TAC, TIC TAC…
Un duvet chaud et ronronnant vient doucement le frôler ; Mieux réglé que son horloge, son chat entonne le levé.
Des bruits hagards montent jusqu’ici, indiquant le début des activités sur le parvis.
Un clic distinct se fait entendre, glougloutant sans encombre, la cafetière s’active et libère des embruns parfumés aux moiteurs du matin.
S’étirant de tout son long d’un onduleux élan, la queue droite comme un point d’exclamation, le matou fait savoir qu’il est temps de lui emboîter le pas.
L’homme se lève doucement, forçant ses yeux à vaincre le picotement de son sommeil. Une jambe après l’autre, pendant du lit, pour se toucher au sol sans un bruit.
TIC TAC, TIC TAC…
Le rappel lancinant résonne comme artéfact précieux le reliant à son temps poussiéreux..
C’est d’un pas traînant qu’il s’extirpe de sa pièce, son chat le chaloupant, plaidant une caresse, un miaulement, un " mrouhh ", un va et vient sans cesse. Son maître sourit docilement et s’exécute au rituel, le repas pour son félin, la cafetière en rappel.
Une tasse ou deux, la biscotte qui croustille ; D’un doigt frileux il allume sa radio, en ton fiévreux, elle réagit aussitôt..
Météo, news, embouteillages, horoscope, conseil culinaire, tout s’enchaîne sans l’entrechoquer en résonance dans sa chaumière.
TIC TAC, TIC TAC…
Les volets ouverts laissent pénétrer un courant d’air empanaché d’odeurs d’asphalte, de pots troués, de sons grégaires et estompés.
Toilette finie, pour le chat et lui ; L’un part à l’aventure sur le parapet, l’autre s’aventure sur son palier.
Le craquement du bois accompagne ses pas jusqu’à sa boîte aux lettres d’où dépasse son journal plié. Sa radio criarde s’accommode de son manque de sonorité ; Lui pose son journal sur la commode, arrangeant les coussins du fauteuil avec célérité.
Un coup d’œil au-dehors pour voir que là on vit ; Une vrille lui traverse le corps et s’espace sans oubli.
TIC TAC, TIC TAC…
Aucun autre bruit ne fait écho à cette ritournelle, même pas sa radio dont l’indifférence chancelle. Il l’éteint, ouvre le frigo où rien ici ne le charme.
Il se sert un verre d’eau, un cachet pour sa forme, un autre pour son dos, quant à ses idées difforment, il tirera le rideau.
Il retourne son pas lassant chuintant sur le carrelage ; De là jusqu’au salon, la pensée en voyage, il s’approche du divan, déplaçant son journal sur la table.
Au crissement délivré quand ici il s’installe, il répond entre ses dents sales.
Son regard va d’un point à l’autre de sa pièce ; Rien ne peut plus y étinceler que son cœur en détresse.
TIC TAC, TIC TAC…
Il tend sa main fripée d’une allure hoquetée pour saisir son quotidien qu’il commence à déployer. La première page s’affiche à lui en caractères gras et striés, mais son regard ne s’attarde pas, tournant les feuilles de façon étriquée.
Son souffle se fait lourd et sa vue embuée, l’odeur fade en retour venant le titiller.
Il s’arrête sur le carnet du jour ; Combien d’amis y ont défilés au milieu de cette grille de lettres assemblées ?
Une légère sueur froide rehausse sa nuque ; Un écran humide lui échappe des yeux, absorbé par les fibres des pages ; Elle est là encrée à jamais en mémoire…
" HELENE " …
TIC TAC, TIC TAC…
La pendule du salon s’en ressent à peine…
( à suivre … )
20/12/05 O.J.
