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Dans la touffeur des rues sombres de Douala,
Eclosent les langueurs d'une nuit sans éclat.
Dans un bar sordide j'écluse une bière,
Affalé au comptoir, le coeur sous muselière.

« Bonjour chéri, tu veux me payer un coca ? »
La voix est éraillée. Sans doute le tabac.
De la tête en grognant je lui montre une chaise,
Elle s'assoit près de moi, nerveuse, mal à l'aise.

Elle porte une robe de polyester cerise,
Du même rouge que ses lèvres marchandises.
Dans son regard flotte une infinie tristesse,
Un voile impalpable d'innocente détresse.

Elle n'a pas vingt ans, encore une gamine,
Coiffée de cent nates très longues et très fines
Auxquelles se mêlent de petits bouts de laine,
Et des perles rouges en jolie porcelaine.

De son bras dénudé elle effleure le mien?
« Tu sais je te fais tout !». Comme je ne réponds rien
Dans un murmure gêné « c'est trois mille chéri »
Cinq euros pour sa vie ! Quelle saloperie....

«  Tu es jolie fille! Pourquoi tu te bousilles ? »
Son visage se fige, soudain son regard brille
D'un pleur camoufflé dans un éclat de rire.
« Toi le blanc tu sais pas, ce que c'est que souffrir  ».

Las, je me relève laissant la belle en plan
Etreint par un soudain et vague écoeurement.
En posant dans sa main un billet de mille francs,
Je solde mon émoi par un geste infamant...

« On ne choisit pas les trottoirs de Manille »!
Quel est ce monde pourri où une pauvre fille
Tapine dans les bars, au bout de la souffrance,
Dans un triste silence teinté d'indifférence ?

[lacape]

ça existe, tu le décris bien !
amitié

Ouais ! .... décrire, condamner, crier sa révolte ... tout cela est si dérisoire. Mais que doit on faire ? Je ne l'ai jamais su.
Amitiés.

[moonage]

bien vu..simple et touchant, sobre et implacable.