La Morte Saison
#1
Posted 22 November 2006 - 03:58 PM
(Poème à deux voix)
— C’est la morte saison
Mais de quoi meurent-elles ?
La princesse lointaine aux cheveux d’amertume
Ne chevauchera plus parmi les châtaigniers.
Sa fière jument blanche évanouie dans la brume
Fuyant le souvenir de sa haute lignée
— Les chimères s’en vont
Quand l’hiver les appelle…
Elle est peut-être allée dans les pas de la nuit,
Au trot, le regard clair fixé sur les mystères,
Tournant dans l’allée sombre au delà des grands buis,
Dissoudre son désir dans l’obscur des jachères.
— Sournoises sentinelles,
Les démons guetteront.
Près des bassins de marbre aux statues de soupirs,
Elle ne viendra plus vous offrir son attente.
Le rosier s’est fané, l’eau calme va croupir,
Un souffle éparpille au vent les âmes mouvantes
— Que nous dévoile l’eau
Immobile et profonde,
Le poète errera feue la rose à la main,
Chère rose incarnat ensemencée de pruine,
L’espoir ourlé dans l’âme et le coeur en chemin,
Fantôme opalescent hâve lambeau de bruine...
— Des gouffres abyssaux,
L’intime de nos mondes ?
Les statues vert-de-gris des belles nymphes nues
Se penchent: elles contemplent cet or incolore,
Le clair cristal que voile un souffle si ténu
Et dans la profondeur le reflet s’évapore.
— Que gravent les chagrins
Aux paupières des marbres ?
Les sources débordantes ne couleront plus
Qu’en fontaines à l’onde insondable et ombreuse,
Réfugiées et noyées dans les recoins feuillus,
Ne reflèteront plus les nuées voyageuses.
— Les secrets, les écrins
De nos soupirs funèbres?
La forêt murmurante et obscure enfouira
Pour toujours les regrets, les amours, les ivresses
Dans les murs ivoirins d’un château d’opéra
Dissimulé au cœur de l’ombre forteresse
— Nous le découvrirons
En cherchant les cachettes
Aux sources défuntes ceintes de nostalgie
Je reste seule assise sur la pierre grise
Où soupire l’eau noire immobile et rougie
De feuilles ou de sang, mon amour s’éternise...
— Où nous protègerons
Nos rêves et nos quêtes.
Artemisia
#2
Posted 22 November 2006 - 04:17 PM
Sinon, pour la métrique, presque tous les alexandrins sont bien balancés. Me paraissent fautifs ou boiteux :
"Un souffle éparpille au vent les âmes mouvantes" (douze syllabes, mais la structure de l'alexandrin est 7 / 5, ce qui le rend difficile à scander harmonieusement)
"Se-pen-chent:-e-lles-con-tem-plent-cet-or-in-co-lore" (treize syllabes)
"Les sources débordantes ne couleront plus" (structure 7 / 5)
"Aux sources défuntes ceintes de nostalgie" (structure 7 / 5)
"Je reste seule assise sur la pierre grise" (structure 7 / 5)
...Cela dit, je m'adonne moi-même à la structure 7 / 5 à l'occasion, je te signale ces vers au cas où tu voudrais donner dans le purisme métrique, car cette structure n'est pas admise je crois en poésie classique.
Les rimes me paraissent amplement suffisantes, peut-être "main" / "chemin" est-elle un peu facile... Pour ce qui est des rimes masculines, féminines, etc. je te renvoie à jc-blondel ou Condor qui savent et pas moi.
#3
Posted 22 November 2006 - 05:16 PM
Un regard extérieur est vraiment utile!
Je vais revoir les vers qui claudiquent...
Au sujet des alexandrins, il me semble avoir lu quelque part qu'il existe des alexandrins classiques et des romantiques.les classiques, tout le monde connait, mais les romantiques... ? C'est une question de place des accents, je crois...
peux-tu m'en dire plus ?
Merci encore
Artemisia
#4
Posted 22 November 2006 - 10:54 PM
http://www.ebabylone...Alexandrin.html
Bonne soirée !
#5
Posted 23 November 2006 - 10:11 AM
c'est que je suis nouvelle en alexandrins,
enfin presque... c'est que le lycée est déjà loin...
Artemisia
#6
Posted 23 November 2006 - 10:02 PM
Un regard extérieur est vraiment utile!
Je vais revoir les vers qui claudiquent...
Au sujet des alexandrins, il me semble avoir lu quelque part qu'il existe des alexandrins classiques et des romantiques.les classiques, tout le monde connait, mais les romantiques... ? C'est une question de place des accents, je crois...
peux-tu m'en dire plus ?
Merci encore
Artemisia
L'alexandrin classique ou tétramètre comporte 4 accents toniques sur les 4 mesures de l'alexandrin, donnant ainsi un rythme de 3/3/3/3 Ex : Je levis, je rougis, je pâlis à sa vue (Racine)
et l'alexandrin romantique appelé aussi trimètre, inventé par Victor Hugo, ne compte plus que 3 mesures de 4 syllabes Ex: J'ai disloqué ce grand niais d'alexandrin (V. Hugo), donnant un rythme de 4/4/4.
Quant au décompte, je ne suis pas vraiment d'accord sur les 7/5 comptés auparavant.
#7
Posted 24 November 2006 - 01:02 AM
"Aux sources défuntes ceintes de nostalgie", la césure a bien lieu après la sixième syllabe ; ce qui m'a donné cette impression de déséquilibre dans le vers, c'est que ladite césure intervient après une syllabe qui en prose serait muette (le "tes" de "défuntes"). Dans ce cas on a du mal à scander le vers.
Pour les deux autres, je vois toujours une césure après la septième syllabe du vers...
#8
Posted 24 November 2006 - 01:09 PM
La morte saison
— C’est la morte-saison
Mais de quoi meurent-elles ?
La princesse lointaine aux cheveux d’amertume
Ne chevauchera plus parmi les châtaigniers.
Sa fière jument blanche évanouie dans la brume
Fuyant le souvenir de sa haute lignée
— Les chimères s’en vont
Quand l’hiver les appelle…
Elle est peut-être allée dans les pas de la nuit
Au trot, le regard clair fixé sur les mystères,
Tournant dans l’allée sombre au-delà des grands buis,
Dissoudre son désir dans l’obscur des jachères.
— Sournoises sentinelles,
Les démons guetteront.
Près des bassins de marbre aux statues de soupirs,
Elle ne viendra plus vous offrir son attente.
Le rosier s’est fané, l’eau calme va croupir,
Un souffle froid disperse au vent les vies mouvantes
— Que nous dévoile l’eau
Immobile et profonde,
Le poète errera feue la rose à la main,
Chère rose incarnat ensemencée de pruine,
L’espoir ourlé dans l’âme et le coeur en chemin,
Fantôme opalescent hâve lambeau de bruine….
— Des gouffres abyssaux,
L’intime de nos mondes ?
La statue vert-de-gris de belle nymphe nue
Se penche : elle contemple cet or incolore,
Le clair cristal que voile un souffle si ténu
Et dans la profondeur le reflet s’évapore.
— Que gravent les chagrins
Aux paupières des marbres ?
Les sources débordantes ne couleront plus
Qu’en fontaines à l’onde insondable et ombreuse,
Réfugiées et noyées dans les recoins feuillus,
Ne réfléchiront plus les nuées voyageuses.
— Les secrets, les écrins
De nos soupirs funèbres ?
La forêt murmurante et obscure enfouira
Pour toujours les regrets, les amours, les ivresses,
Dans les murs ivoirins d’un château d’opéra
Dissimulé au cœur de l’ombre forteresse
— Nous le découvrirons
En cherchant les cachettes
Où nous protégerons
Nos rêves et nos quêtes.
A la source défunte ceinte en nostalgie
Je reste seule assise sur la pierre grise
Ma main trouble l’eau noire, immobile, assagie,
Résurgence sereine, un amour s’éternise...
En faisant des recherches, j'ai lu que dans le vers classique, un e muet peut se trouver à la septième syllabe à condition que la syllabe suivante soit une voyelle...
ex:
par contre
ne convient pas car le e muet n'est pas élidé
et pas non plus
car le e muet est à la 6° syllabe
Alors si ce qu'ils disent est vrai, les vers sont (à peu près) convenables...
mais dites-moi votre avis.
merci
Artemisia
#9
Posted 24 November 2006 - 06:55 PM
"Se penche : elle contemple cet or incolore"
"Les sources débordantes ne couleront plus"
"A la source défunte ceinte en nostalgie"
"Je reste seule assise sur la pierre grise",
la syllabe n° 7 (que j'ai marquée à chaque fois en gras) est suivie d'une consonne et non d'une voyelle, ce qui déséquilibre l'alexandrin. Mais, encore une fois, cela ne ma paraît pas rédhibitoire ! Il faut voir si tu tiens à écrire des alexandrins classiquement ou romantiquement balancés...
#10
Posted 27 November 2006 - 02:19 PM
"Se penche : elle contemple cet or incolore"
"Les sources débordantes ne couleront plus"
"A la source défunte ceinte en nostalgie"
"Je reste seule assise sur la pierre grise",
la syllabe n° 7 (que j'ai marquée à chaque fois en gras) est suivie d'une consonne et non d'une voyelle, ce qui déséquilibre l'alexandrin. Mais, encore une fois, cela ne ma paraît pas rédhibitoire ! Il faut voir si tu tiens à écrire des alexandrins classiquement ou romantiquement balancés...
Oui c'est exact, tu as raison. Je n'ai pas dit que j'avais tout corrigé.
j'ai enlevé les 13 ° pieds des verts bien trop boiteux, les autres...
je vais les laisser reposer un peu... et j'y reviendrai, mais le romantiquement balancé ne me déplait pas...
Et si tu me dis que ce n'est pas rédhibitoire, je te fais confiance !
Merci encore
Artemisia
#11
Posted 01 December 2006 - 10:06 AM
http://www.ebabylone...Alexandrin.html
Merci pour le lien... les infos d'alains1 et le texte d'arté. On en apprend tous les jours sur l'alexandrin. Et si en plus il est romantique...
je me replonge dans Boileau, du coup.
Jaguar.
#12
Posted 02 December 2006 - 05:33 PM
Il a fait du chemin , ce petit texte , n'est ce pas ;-) ?
En fait il m'a poursuivie pendant longtemps, avec son goût d'inachevé.
la dernière version (presque) achevée est dans le salon principal, j'ai encore modifié certains vers qui coulent mieux... comme l'eau des fontaines dans les grands parcs en hiver, hé hé, il faut que tout soit dans l'ambiance...
Chez moi tout est toujours en devenir.
Mais c'est comme ça qu'on reste jeune, n'est ce pas, jaguar ;-) ?
je remercie encore Soque et son oeil avisé , elle repère tout de suite ce qui cloche!
Artemisia
#13
Posted 02 December 2006 - 07:22 PM
#14
Posted 03 December 2006 - 03:43 PM
Artemisia
#15
Posted 19 December 2006 - 05:57 AM
Ce vers est OK pour moi , car à l'oral mettre la césure pile à l'hémisticheet donc lire en6/6, ne casse pas ici le rythme
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