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sommier


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#1 sellatvn

sellatvn

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  • TLPsien
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Posted 15 December 2005 - 11:43 AM

-SOMMIER-


Des heures, lentes et inexorables, comme des ruines réfléchies par la glace d’un matin d’hiver, s’enfilaient sur le crépis inégal des cloisons de la pièce. A chacune qui passait, je me levais sur mon échelle en bois, et, soupesant les oiseaux malades me faisant face, criait une grappe au destin. Des jours, moites et translucides, se cognaient aux reflets buées de la fenêtre et mon arrogance à les remplir de boules creuses s’étalait alors largement, des murs en briques à la moquette. Celui, qui, par mégarde, posera ses pieds dans le cloître béant de cet entêtement, sera certainement frappé par les petits oiseaux sans aile, lissés d’un bout à l’autre de la table.

Parfois un homme au front garni de tapenade traverse la pièce, et, dans son sillage, une masse décharnée de toute sensation, roule sur ses traces, levant de ci, de là, ce qui paraît être une tête et qui, humant l’air, ébouriffe les plumes de ses omoplates. Un cigare éteint disloque le tapis de soie blanche, et par nuées la folie survient, projetant de gravir une à une les marches me séparant du plancher. A la volé, la poêle à frire les tentations d’avant-garde, se muait d’une gorge rougeoyante ; et l’homme, déposant ses mains sur sa surface plane, paraissait lui vouer une vénération si délicate que les gonds de la porte, décollés quelque peu de leur armature en bois, lui souriaient calmement entre les veines et le satin.

Sous la vitesse délurée de sa course, le cafard à bouche de femme sifflait sans raison et ses petites pattes attaquaient les touffes bouclées de la moquette. Ô cafard ! Patient protecteur des mules placardées, figures-toi que mon buste dressé sur les branlantes fondations du ciel recréé, se gonfle et remue aux mouvements de tes pattes ! Je te soupèse, je te souligne avec l’œil ridé de l’imperfection besogneuse. J’avais placé deux antennes aux cheveux éoliens de mon front. Je les ai mises sur mon crâne pour toi, avec comme seul but, les silex de tes pattes, les rigides fondations de ta considération. Ta carapace, ô la fleur, si mes doigts ne retenaient leur intrinsèque maladresse, serait chaque jour caressée comme on le fait d’un animal domestique, que dis-je ! D’une femme domestiquée !

L’homme revenait sur ses pas, coiffé de saucisses rouges saupoudrant la tapenade. Sur mon grand lit de plastique, étalé sur le ventre, je renifle les bâtardes pulsions du cloître sans pièce. Et tombant comme un ange qui aurait perdu ses ailes, la tête d’une femme s’écrasa sur le plancher.




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