Jump to content


Photo

Sur Les Marches Du Perron…


  • Please log in to reply
4 replies to this topic

#1 Marygrange

Marygrange

    .............................

  • TLPsien
  • 6,796 posts
  • Location:Paris, France

Posted 03 August 2006 - 08:18 AM

Juin 1957 à Saint-Leu-La-Forêt, sous une forte canicule, d’après ce que m’avait dit un jour ma mère. J’avais trois ans et me promenais dans le jardin avec mon lapin en peluche sous le bras, cheveux bruns attachés en macarons, et des rêves plein la tête. Enfant sauvage, ces promenades devaient déjà façonner ma pensée de poète sans le savoir.
Mais il faisait chaud, de plus en plus. Prise d’une fatigue subite, je me suis assise sur les marches du perron.
Alice s’est approchée.
─ Ça va, Léa ?
Comme je ne répondais pas, elle s’est assise à côté de moi. Elle a regardé ma mine défaite, plus boudeuse que jamais, si c’était possible. Je me demande si c’était de la vraie bouderie ou de la circonspection devant le monde géant qui s’ouvrait à mes frêles années. J’étais méfiante de l’inconnu. Mais quand je me rassurais, je pouvais me montrer bien curieuse et bavarde avec les gens. Timide encore, j’ai quand même changé, mais je m’adapte aux nouveautés de l’existence toujours difficilement.
J’avais bien sûr mes crises d’entêtement, mais n’était-ce pas parce qu’on voulait trop me faire sortir de mes rêves ?
Alice toucha mon front brûlant. Je ne cillai pas.
─ J’ai bobo tête, je finis par dire.
Elle m’a prise dans ses bras et m’a rentrée à l’intérieur, puis m’a déposée sur mon petit lit à barreaux.
─ Maman, Léa est malade !...




─ Il conviendra de l’envoyer à l’hôpital pour des examens, dit le docteur à ma mère.
─ Ne serait-ce pas la polio ? Il y a beaucoup de cas en ce moment ici. Oh, si je l’avais vaccinée…
─ Le vaccin est au stade expérimental, Madame. C’est pour cela que l’épidémie est si importante. Mais je ne crois pas que ce soit la polio. La fièvre et ses maux de tête violents me font plutôt penser à une méningite.




Ma mère m’a souvent parlé de mes hallucinations. Je voyais le Père Noël et ses rennes passer devant moi. Dans mon délire, je lui demandais de m’aider à les enlacer. Je voulais faire ma commande de cadeaux au Père Noël… Je lui disais « aide-moi ! », et elle me prenait les bras pour suivre le mouvement imaginaire. Elle était gentille ma maman. Aider son enfant à attraper un Père Noël onirique, en plus l’été, il n’y a pas meilleure preuve d’amour.
Bien sûr j’ai perdu souvenir de toute cette période. La fièvre avait perturbé ma mémoire, et de toute manière on ne se souvient pas du temps de ses trois ans. J’acquiesçais donc toutes ces choses que me racontait ma mère. Elle savait tout selon moi.
Il paraît que je chantais beaucoup, sans doute pour oublier mes souffrances. Je le faisais aussi au temps de mes crises d’acétone, probable conséquence de la maladie. Et puis, j’aimais ça comme ma maman, les chansons.
Il fallait bien que je me distraie à la maison quand le reste de la famille était dehors, Papa à l’Armée, mon frère et ma sœur à l’école. J’étais seule avec maman trop occupée avec les tâches ménagères pour rester avec moi. Alors j’écoutais la radio et je chantais.

D’accord les bras bougeaient, mais le reste du corps était inerte. Ma mère s’inquiétait de plus belle et ne pouvait s’empêcher de repenser à la polio. Une amie de ma sœur en était atteinte. Elle s’appelait Michèle Michel. Un tel nom cela ne s’oublie jamais ! Elle venait souvent chez nous jouer avec Alice. Les deux amies confectionnaient des costumes en papier chiffon. Elles adoraient se déguiser. N’importe quelle occasion de fête d’école ou d’anniversaire était bonne pour de nouvelles robes mauves, vertes, roses, jaunes… Ma sœur était douée de ses mains. D’ailleurs elle devînt professeur de dessin.
Le médecin n’eut d’autre recours que de m’envoyer aux Enfants Malades, aujourd’hui l’hôpital Necker, à Paris. Là, le diagnostic se confirmait selon les craintes de ma mère, c’était bien la poliomyélite sous forme méningée. Et si Michèle m’avait contaminée ? On ne peut le savoir. J’aimais bien sucer des choses qu’il ne fallait pas, comme tous les enfants de cet âge. C’était des pelures de pommes de terre que je ramassais sur la table de la cuisine, et des cailloux que je mettais dans la bouche sans les avaler quand j’étais dans mon bac à sable devant la maison. Le virus ne serait-il pas venu par ses mauvaises pratiques ? Je n’en sais rien, mais je ne crois pas que ce soit à cause de l’amie d’Alice. Mais qui peut le dire vraiment ?
Alors j’appris à souffrir de mon corps certes, mais en même temps je découvrais une autre vie à l’hôpital, moins solitaire qu’à la maison. J’avais beaucoup de différences avec les deux aînés et j’étais la dernière. Alors les gamins de mon âge cela devait me manquer, à moins que des petits voisins venaient me voir, je ne sais vraiment plus. Les seuls souvenirs que j’ai de mes trois ans sont des photographies, dont celle de moi marchant autour de notre pavillon quelques jours avant… Comme j’aimerais reprendre le corps encore sain de cette enfant-là et l’aider à éviter les pièges du mal qui devra l’assaillir !

#2 INFONTE

INFONTE

    INFONTE

  • TLPsien
  • 1,076 posts

Posted 03 August 2006 - 10:51 AM

Le sujet est mis à distance, trés loin.
Est-ce voulu ou inconscient ?
L'autobiographie est un piège savoureux et dangereux. Si c'est le cas, le chemin est encore long à mon avis.
S'il s'agit d'une fiction, il faudrait prendre un parti : l'oeil de l'enfant au présent de narration ou la mémoire de l'adulte à l'imparfait.
Ce texte hésite trop.
C'est dommage.

#3 Marygrange

Marygrange

    .............................

  • TLPsien
  • 6,796 posts
  • Location:Paris, France

Posted 03 August 2006 - 05:27 PM

Infonte, ici je ne dévoile pas vraiment le sujet. D'abord dire qu'il est loin d'être terminé ce roman. Il se fait. J'en suis à la fin de la seconde partie sur trois en principe. A la fin, il y aura une correction globale et sans doute plus...
Il s'agit en fait d'une sorte de journal entre autobiographie et fiction. Le personnage principal, Léa, s'adresse à un ami qu'elle a perdu. C'est une explication, une sorte de plaidoirie sur des faits que je ne mentionnerai pas ici à travers le survol d'une existence. Si je poste d'autres extraits, je n'aborderai pas les passages qui relatent le sujet en lui-même. Pas ici, sur ce forum...

Amicalement,
Béa

#4 ambreance

ambreance

    .............................

  • Tlpsien+
  • 866 posts

Posted 07 August 2006 - 10:29 PM

Un grand plaisir de te croiser à nouveau Béa
... un roman, quel courage !
je t'adresse tout plein de pensées "énergisantes" alors.
Amitiés
Ambréance

#5 Marygrange

Marygrange

    .............................

  • TLPsien
  • 6,796 posts
  • Location:Paris, France

Posted 21 August 2006 - 07:07 PM

Quand j'ai voulu te répondre, Ambréance, il y avait impossibilité de répondre. Aujourd'hui cela est résolu.
Oui, un roman qui ne commence pas par ce texte. En fait, le journal, dont cet extrait est tiré, ne sera qu'une partie de l'histoire. Je l'ai décidé après ma réponse à Infonte. Dire aussi que j'ai encore réécrit ce passage en plus réduit...

Merci pour tes encouragements wink.gif

Amitiés,
Béa




1 user(s) are reading this topic

0 members, 1 guests, 0 anonymous users