J’ai au fond de mon cœur
Un poème qui dort
Un poème somnolent
Volatil, insaisissable
Il est si doux, si frêle
Je voudrais m’en saisir
Mais il me glisse entre les doigts
Tellement il est idéal
J’ai crainte de lui donner forme
Les mots ces ingrats, le trahiront
Ils le violeront et le travestiront
Alors je me satisfais à le contempler
Son innocence m’attendrit, sa fragilité m’émeut
J’aimerais le mettre au monde
Mais j’ai peur qu’il se salisse
Sous vos mains rustres, vos regards méprisants
J’ai un poème au bois dormant
Et j’ai l’espoir qu’un jour on vienne l’embrasser
Qu’il se matérialise, qu’il se dévoile
Qu’on loue ses charmes éthérés
Et qu’on l’aime tendrement dans sa pureté
Mais je vous le dis, il est si menu, si gracieux
Couché au fond de mon cœur sur un lit de soie
Il semble en attente entre la vie et la mort
Ses paupières frémissent, sa bouche frissonne
Je n’ose respirer tant je redoute qu’il se trouble
Et qu’il se brise d’étonnement, en se réveillant
Que vais-je faire de lui? Sa beauté me tue…