Parmi les écrivains des siècles précédents, Montaigne (que je lis depuis un demi-siècle) tient une place particulière dans mon Panthéon littéraire. J'ai une sorte de prédilection pour le chapitre XIX du livre I des Essais, où Montaigne se livre, avec l'aide de tout un arsenal de citations latines des plus brillants penseurs de l'Antiquité, à une tentative désespérée de convaincre son lecteur qu'il faut « apprendre à mourir ». Si l'effort est louable, la tentative de Montaigne ne peut qu'échouer : « apprendre à mourir » est chose impossible, tant la Mort, celle de nos proches comme la nôtre, est, pour chacun de nous, inacceptable. Plus j'avance en âge, plus je prends conscience de cela. Je dirais même que, sans le vouloir, Montaigne me convainc, désormais, dans ce chapitre, d'accorder du prix à la vie : il atteint, auprès de moi, le but opposé au but escompté. La Fontaine l'exprime très bien, en conclusion de « La Mort et le Bûcheron » : « mieux vaut souffrir que mourir, telle est la devise des hommes ».
10/1/17