Et si nous n'étions
Que des bonhommes de neige?
D'un hiver imaginaire
Avec un talc sublime
Dans les cheveux
Quelques grains de sucre granulé
Au bout des cils
Donnant un air merveilleux
À nos yeux de charbon
Avec une bonne bouille
Pleine de farine
Mais les deux pieds
Dans la même bottine
Remplie de gadouille
Et si nous n'étions
Que des bonhommes de neige?
Surpris par l'haleine suave
D'un printemps précoce
Rien que des bonhommes de neige
D'un hiver désincarné
Un lied de Schubert
Avec les frissons mortels
De notre identité
Qui appelle l'horizon
Au fond de nos âmes
Qui à force de lenteur
Se diluent, se désagrègent
Avec cet accent boréal
Que les canards imitaient
Quand les vents du noroît vociféraient
Et que les grandes marées grondaient
Mais voici l'entourloupette
Sous les larmes du verglas
Les arbres sont des miroirs
Des gisants en pleurs
Peut-être des linceuls
Et l'hiver se fend en 4
D'un air misérable
Le ciel craque d'émotions
Dans les champs
Souffle le suroît
D'une douce brise
Qui enflamme
Les pâturages
Dans nos ventres
De bonhommes de neige
À l'évidence
On s'est gouré
La neige n'était qu'un rêve
Un instant
Un chouia
Quelques arpents
De langue française
Sur une page blanche
Et le frimas des anges
Qui s'étire dans un rêve
Jusqu'à la fonte des hivers
Et si nous n'étions
Que des bonhommes de neige
Avec une fleur de lys
Glacée dans nos mains
Qui lentement se liquéfient ?