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(anthologie permanente) Emmanuel Fournier, "où des substrats et où une demeure ? "


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Posté 03 février 2017 - 11:06

 

Eric Pesty éditeur publie La Comédie des noms dâEmmanuel Fournier.


Giudecca Palanca â Redentore â Zitelle â
San Zaccaria (Jolanda)-

    Les noms et les concepts, instruments au service dâun besoin : moins un besoin de connaissance quâun besoin dâidentification, en vue de prévisions et de manipulations. Quelle connaissance en effet par les noms (hormis les considérations dâidentité dâordre policier) ? Une certaine compréhension des sentiments et des émotions, une intelligence indéniable des « choses », tout à coup aptes à quelque intrigue. Un discernement authentique, indissociable de lâacte de dénomination, mais juste suffisant pour nos manÅuvres.
    Les noms et les nombres, comme outils de domination efficaces (du monde, des autres ou de soi-même), mais au prix dâune violence sur la réalité. Par supposition de lâexistence de choses identifiables (dans lâusage même du nom et du nombre). Par réduction du divers à lâidentique, du nouveau au déjà vu, de toute qualité à de lâégalité (Nietzsche encore). Par soumission à lâéquivalence et au quantifiable. Par affaiblissement du devenir et du mouvement dans lâimmobile. Par enfermement du réel dans des catégories. Par nivellement et par désespérance.
    Quelle vérité ? Où donc une objectivité neutre ? Où une identité dans la mobilité universelle ? Où cela des choses ? Où des catégories de la substance et de la pensée ? Où des substrats et où une demeure ? Où une identité des choses à elles-mêmes derrière les changements ? Où, sinon dans nos rêves fantasques.
    Rejet de lâoriginalité, imposition dâune vision commune, banale et rassurante du réel, en vue dâune possibilité de manipulation, en fonction de nos intérêts. Acquisition non dâune connaissance absolue des choses, mais dâune puissance sur les forces naturelles, dâune possibilité de domination, etc. Mais à quel prix ? Quelle place pour la qualité et le mouvement au bout de la réduction ? Des sortes de miracles ? Bons seulement pour lâélimination ? À la poubelle les couleurs et les sons ! Seules les longueurs dâonde et les fréquences ! Au rebut lââme et lâesprit, et peut-être même la pensée (au risque de contradiction) ! Seuls les « états mentaux » observables et les images dâaires cérébrales ! Pas de regard en arrière, pas dâencombrantes vieilleries, pas de juxtaposition des anciennes et des nouvelles visions !
    Désert et appauvrissement ! Seul soi, nous seuls, avec nos noms, nos chiffres, nos nombres et une législation de la raison valable universellement pour nous tous⦠Et quelle issue ? Refuge dans lâhyperspécialisation aveugle ou dans une histoire des idées, érudite mais loin de la vie urgente, et retrait dans un scepticisme stérile et sans danger ?

Emmanuel Fournier, La Comédie des noms, Eric Pesty éditeur, 2016, 40 p., 9â¬, p.18.

Intéressante et très complète fiche sur Emmanuel Fournier dans Wikipédia : « Emmanuel Fournier sâoriente en 1975 vers l'étude de la philosophie (université Paris I, EHESS, traductions) et du dessin (ateliers de la Ville de Paris, académie de la Grande Chaumière, transcriptions). Il suit des formations complémentaires en médecine « pour se plonger autrement dans les questions du corps et de l'humain » (faculté de médecine Pitié-Salpêtrière), mais aussi en mathématiques, électronique, informatique et neurosciences (université Paris VI - Pierre et Marie Curie), afin de tenter de comprendre en particulier les relations de la pensée à la matière et au cerveau. (â¦)
Il est l'inventeur de la méthode infinitive, une façon "non finie" de réfléchir et de penser qui s'appuie sur une langue dépouillée, toute en verbes, sans substantifs. Il l'utilise avec ironie et poésie pour déjouer les préjugés, les stéréotypes et les dogmatismes inscrits dans les modes de pensée et d'expression ordinaires et savants. La méthode infinitive et les méthodes développées de front en philosophie et en dessin visent à alléger les différentes entraves de la pensée et à dégager des possibilités plus ouvertes, plus actives, d'être, de faire et de vivre. »

Prière dâinsérer de lâéditeur : « Dans La Comédie des noms, comme le titre de ce livre le suggère, lâauteur sâenjoint dâexplorer tout de même le domaine des substantifs pour que cette catégorie grammaticale, suspendue jusquâici de lâécriture, ne restât pas non plus un impensé. Câest donc dans une langue nominale, qui fait abstraction résolument de tout verbe, et là encore parfaitement grammaticale, que La Comédie des noms se déploie, comme un antipode du projet général de lâauteur, ou encore : un gant retourné. »

 

 

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