Mercredi 29 août 2012 / 0335
Philippe Sollers pense que lire et écrire sont la même chose. Pour moi, écrire est devenu aussi essentiel que de respirer. Prolongement naturel du sommeil, éveil, le corps éprouve ce qu'il est, ce qu'il devrait être. Le lecteur se transforme alors en amant distrait ou passionné.
C'est avec "Le secret" de Philippe Sollers que j'ai vraiment appris à lire et que ma conception de l'écriture en a été changée. Avant, parce qu'il faut bien qu'il y en ait eu un, je lisais boulimique, n'importe quoi, n'importe comment, des livres qui, pour la plupart ne m'ont pas laissé de grands souvenirs, n'ont pas fait bouger mes lignes. J'étais agrippé à ce plaisir de goinfre, sans me rendre compte que, comme un chien, je ne mangeais que les restes.
J'avais aussi le mythe de certains grands auteurs, surtout de poésie, mais que j'avais mal compris, mal digéré. Ma digestion est-elle meilleure aujourd'hui ? Je ne sais.
C'est donc par un article de Sollers sur Francis Ponge que j'ai pénétré dans "Le secret" et tout de suite ce fut l'enchantement, la fascination. Je me suis demandé comment faisait cet homme pour parler de moi avec autant de justesse, car une des pages du "Secret" me décrit plus que je n'aurais su le faire moi-même. C'est alors que j'ai arrêté de lire des livres.
Maintenant, lorsque je découvre ou redécouvre un auteur, un dialogue s'instaure dès les premières lignes. J'écris. Ainsi il me faut un temps infini pour aller jusqu'au mot fin. Je dérive lentement, voluptueusement. Ecrire n'est plus une urgence militante ou un amusement, comme mes premiers poèmes, mais une respiration profonde. Je baigne avec bonheur dans le liquide amniotique de cette bulle que je ne voudrais jamais quitter.
Peu importe le thème, le choix des mots, enfin ce sont plutôt eux qui me choisissent, ni la forme, ni même l'idée d'être un jour publié. Peu importe de savoir si j'ai quelques talents ou pas, si j'ai un style ou si mon écriture est plus plate que la Belgique, ni même si mon interprétation de mes lectures est juste. J'écris. Et je danse avec les jours et les mots.