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De multiples lieux


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1 réponse à ce sujet

#1 michelconrad

michelconrad

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Posté 23 avril 2017 - 08:14

 

 

De multiples lieux ont constitué, pour moi, des rencontres manquées, au milieu desquelles il me reste, pourtant, quelques jaillissements de lumière. Certaines images, certains sons ne s’effacent pas : la première fois que j’ai vu la mer, à douze ans , du haut de la falaise d’Etretat : c’était donc, cela, l’objet de tant d’écrits, ce bruit de tempête, ce vent qui fouette le visage, cette puissance effrénée ?

 

Parce qu’ Eve Malleret (1945-1984) m’avait dit : « toi, un poète, tu n’as pas vu Venise et Léningrad ? Tu dois y aller d’ urgence » j’allai à Venise et Léningrad. Ces deux villes , c’est vrai , sont construites pour le rêve, et il faudrait avoir un cœur de pierre, pour n’y pas sentir, à leur spectacle, naître en soi une âme d’artiste. Il faut voir, en été, San Giorgio Maggiore, au soleil couchant, cette proue d’un navire qui s’abîme dans le crépuscule. A Saint-Pétersbourg, en novembre, depuis la salle des Rembrandt de l’Ermitage, la Néva gelée, où un brise-glace ouvre un chenal pour les navires, il faut entrer dans la maison où l’on porta , mourant, Pouchkine, après son duel avec le Français Georges-Charles d’Anthès, il faut voir la petite chambre d’étudiant de Pouchkine adolescent, à Tsarskoïe Siélo.

 

Je ne peux oublier ces deux villes, par plus que je n’oublie les alignements des mégalithes de Carnac, lorsque, surgi de nulle part, ou plutôt surgi des confins du Temps, apparut un jouer de cornemuse, dont le son entra en résonance avec le spectacle qui s’offrait sous mes yeux, et me le fit comprendre mieux, de même que je n’oublie pas l’étang dont Monet peignit les nymphéas à Giverny, la colline de Sion que peignit , sous tous les angles, par toutes les saisons, l’aquarelliste Alain Hazemann, ni la palette du peintre Nicolas de Staël, exposée au Musée des Beaux-Arts de Dijon, le retable d’Issenheim au musée Unterlinden de Colmar, la vision fugitive des lacs italiens , vus à travers la vitre d’un autocar, la « Mise au Tombeau » (1515) dans la crypte de l’ église Saint-Jean Baptiste de Chaource, la salle des outrenoir au musée Soulages de Rodez, les calanques ocres de Piana, en Corse, la jetée de bois qui s’avance vers l’océan à Capbreton, le Palais idéal du Facteur Cheval, à Hauterives, le marais poitevin dans la chaleur de l ‘été, la tombe de Chateaubriand, sur un îlot encerclé par l’océan , à marée haute, à Saint-Malo, la tombe de Chagall, à Saint-Paul de Vence, la maison où vécut Tsvétaïeva à Saint-Gilles Croix de Vie, les ruines du manoir, détruit par les Allemands, où vécut Saint-Pol Roux, la maison de René Char, entourée de lavandes, à l’Isle sur la Sorgue, la mosaïque, représentant un squelette, incrustée, dans le sol d’une église de Florence, tel un « Memento mori », la campagne de Toscane, que l’on perçoit depuis la ville, avec ses cyprès, tels des flammes esseulées sous le ciel bleu, ou des points d’exclamation ponctuant le paysage …

 

En ces lieux « souffle l’esprit », selon l’expression de Barrès. mais, s’ils s’inscrivent dans notre mémoire, c’est que nous les percevons à un moment de nos vies où ils entrent en harmonie avec ce que nous sommes, au plus profond de nous : chacun a, en quelque sorte, sa géographie intime des lieux liés à des souvenirs, des rencontres, une douceur de l’air, des sonorités. Cette conjonction de nos états d ‘âmes et de ces signes envoyés par le monde extérieur produit cette alchimie, et fait qu’ils s’inscrivent, désormais, en nous, pour l’éternité.

 

 

23/4/17

 

 



#2 Victorugueux

Victorugueux

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Posté 23 avril 2017 - 10:08

Citation de l'évangile de Jean : Le vent souffle où il veut : tu entends sa voix, mais tu ne sais ni d’où il vient ni où il va. Il en est ainsi pour qui est né du souffle de l’Esprit. » à savoir que le pape  Benoit XVI, il en a fait une version personnelle que je n'ai pas trop aimée