Aller au contenu

Photo

(Note de lecture) Patrick Wateau, "Gens de guerre", par Paul Laborde


  • Veuillez vous connecter pour répondre
Aucune réponse à ce sujet

#1 tim

tim

    Administrateur

  • Administrateur principal
  • PipPipPipPip
  • 5 689 messages

Posté 24 avril 2017 - 09:38

<p> </p>
<p class="blockquote MsoNormal" style="text-align: justify; line-height: 125%; margin-left: 40px; margin-right: 40px;"><span style="font-size: 12pt; line-height: 125%; font-family: 'Garamond','serif'; letter-spacing: 1pt;"> <a class="asset-img-link" href="http://poezibao.type...0d15e970b-popup" onclick="window.open( this.href, '_blank', 'width=640,height=480,scrollbars=no,resizable=no,toolbar=no,directories=no,location=no,menubar=no,status=no,left=0,top=0' ); return false" style="float: left;"><img alt="Wateau" class="asset asset-image at-xid-6a00d8345238fe69e201b7c8f0d15e970b img-responsive" src="http://poezibao.typepad.com/.a/6a00d8345238fe69e201b7c8f0d15e970b-75wi" style="width: 75px; margin: 3px 15px 5px 0px; border: 1px solid #969696; box-shadow: 8px 8px 12px #aaa;" title="Wateau" /></a>On entre dans <em>Gens de guerre </em>par un aveuglement : la langue de Patrick Wateau porte des coups à la violence certaine sur le champ de vision de lecteur â ou sur la possibilité même dâun champ de vision. On veut parler dâune poésie dâangles mais câest peut-être faire encore trop de concession à un espace géométrique dont on sent, au fil des pages, lâextinction répétée. Les yeux sont certes régulièrement convoqués (dès le premier poème) mais plus probablement, semble-t-il, pour en soustraire lâhabituelle puissance. Le poète contraint le lecteur à sâinstaller dans un lieu impossible ou peut-être même, si nous nous autorisons le risque de lâabstraction, un lieu de lâimpossible : « Le fagot dâair / sans air / ni fagot / sans chien au ralenti ». La violence est dans la simplicité de lâéchec qui sâimpose à tout espoir de continuité : « Aveugle à traverser le verre / des yeux pour / aveugle / à perdre en delà / et deçà. » On retrouve chez Wateau une volonté dâapprocher le poème par des forces conflictuelles et des oppositions quâon imagine volontairement aporétiques et câest de ces tensions que jaillissent ces fulgurances, brutales et tranchantes : <br /> <br /> Un aboiement quitte la mort<br /> ou non<br /> boit de lâautre côté<br /> boit et mange<br /> ce qui reste<br /> <br /> La prise de parole peut devenir une vocalisation animale pour espérer atteindre cet espace entre-deux, ni stable ni mobile, hermétique à toute affirmation â « la bouche se remet droite / et contrecontre la négation ». Un travail sacrificiel qui impose au corps de transformer son système de valeur, ses priorités : « Dès sa descente de mâchoire / la tête sâarrache les yeux ». <br /> <br /> Communément la mort<br /> étau<br /> vers ce point<br /> où<br /> sâil est le corps<br /> pire est<br /> dâavoir de la découpe<br /> <br /> -<br /> <br /> La fin de voit pas<br /> la fin<br /> elle souche serrée<br /> contre les poings fermés<br /> <br /> Elle ferme ne sait plus<br /> où elle ferme<br /> <br /> Aucune lumière ne paraît poindre et câest comme si lâobscur avait vaincu la perspective, remporté son combat pour la maîtrise de la spatialité et avait décidé à sa suite de lâanéantir â le travail du poète est réduit à lâindication de ce monde sans étendue, le lecteur nâa plus aucune marge ni choix parce quâil nâa plus dâair : sa poitrine se comprime jusquâà éclatement. <br /> <br /> <em>Gens de guerre </em>est divisé en trois partie. La seconde offre un rythme plus soutenu, comme une suite ininterrompue dâénoncés qui butent les uns contre les autres, opposant la verticalité de la chute à la continuité horizontale des trois dimensions. <br /> <br /> <em>Un m</em><em>ê</em><em>me </em><em><br /> </em><em>squelette</em><em><br /> </em><em>succ</em><em>è</em><em>de </em><em><br /> </em><em>à</em><em><br /> </em><em>ce </em><em><br /> </em><em>qu</em><em>â</em><em>ampute</em><em><br /> </em><em>l</em><em>â</em><em>amput</em><em>é</em><em><br /> <br /> </em><em>Si le temps est venu</em><em><br /> </em><em>que jamais ne passe le temps</em><em><br /> <br /> </em><em>Les os n</em><em>â</em><em>ont que les os</em><em><br /> </em><em>et la neige qu</em><em>â</em><em>elle a</em><em><br /> </em><em>de blanchir</em><em><br /> <br /> </em>Patrick Wateau parvient à désorganiser la relation et à la maintenir sous une pression constante au point que la lecture hésite parfois entre anxiété et soulagement :<br /> <br /> <em>On emporte la peau</em><em><br /> </em><em>les os</em><em><br /> </em><em>les pi</em><em>è</em><em>ces</em><em><br /> </em><em>de chair</em><em><br /> <br /> </em><em>Le monde s</em><em>â</em><em>arr</em><em>ê</em><em>te dehors</em><em><br /> <br /> </em><em>Le bruit d</em><em>â</em><em>une feuille</em><em><br /> </em><em>tombe</em><em><br /> </em><em>sur une autre feuille</em><em><br /> <br /> </em>La dernière partie renoue avec la temporalité de la première et continue ce travail de sape, alourdissant le bilan spatial auquel sâajoute désormais une cible nouvelle : le temps.  <br /> <br /> Un autre<br /> lui<br /> lâétranger du sans-fond<br /> à raconter un retour<br /> entre lui et un autre <br /> <em><br /> </em>Le ça-tourne du parquet<br /> <br /> Le poète va de plus en plus loin dans la contorsion, aussi bien corporelle que syntaxique, à moins que ce ne soit, précisément, la même chose. Si la langue de Wateau conserve une force <em>physique, </em>câest quâil ne se contente pas de reconnaître ce double éclatement de la parole et de lâétendue â il parvient à lâimposer à lâÅil du lecteur qui avance et fatigue à mesure que les pages sont tournées <br /> <br /> Le corps empire en fait de guerre  <br /> <br /> Fait le fer des ferreux aux yeux vides <br /> <br /> A lâinstant ultérieur des yeux <br /> la crevure ponctuelle <br /> <br /> La chair est arrachée par une langue de plus en plus massive et déformée, associant des néologismes aux évocations douloureuses à un lexique à la précision scientifique. Les articulations éprouvent la souffrance dâune sortie de la logique â une contradiction radicale imposée à la géométrie et à lâespace quâelle permet habituellement. Le manque est réel â le poète appelle une langue qui ne vienne pas le combler. <br /> <br /> <strong>Paul Laborde</strong><strong><br /> </strong><br /> <br /> Patrick Wateau, <em>Gens de guerre</em>, Obsidiane, 2016, 74 pages, 14⬠</span></p><img src="http://feeds.feedburner.com/~r/typepad/KEpI/~4/Yrbp33el0f0" height="1" width="1" alt=""/>

Voir l'article complet