On ne mesurera jamais assez l’écho que l’on espère, que l’on mendie, lorsqu’on écrit, mais, surtout, à quel point on surestime, quelquefois, la curiosité que suscitent nos écrits. J’appris cela, à mes dépens, un soir où j’étais invité dans une soirée, en compagnie de quelques personnes cultivant les arts, comme moi-même je me flattais de le faire.
Vint un moment, dans la soirée, où l’on sollicita les talents des personnes présentes. Quelqu’un joua du piano. Puis on me demanda de réciter l’un de mes poèmes. Comme j’étais incapable de réciter par cœur quoi que ce soit, je demandai à la maîtresse de maison de me prêter l’exemplaire de « l’Entrée dans le Paysage » (1975), que je lui avais offert et dédicacé, quelques semaines auparavant.
Grande fut ma surprise en découvrant que les pages n’en avaient pas été coupées. Une timidité maladive m’empêcha de réclamer, à haute voix, un coupe-papier, et je m’efforçai de lire mes textes, pour autant que me le permettaient de le faire les pages non coupées : c’est ainsi que s’envolent, une à une, comme des feuilles mortes, un jour de grand vent, les plus douces illusions.
25/5/17
