Aller au contenu

Photo

(Anthologie permanente) en hommage à Joseph-Julien Guglielmi


  • Veuillez vous connecter pour répondre
Aucune réponse à ce sujet

#1 tim

tim

    Administrateur

  • Administrateur principal
  • PipPipPipPip
  • 5 689 messages

Posté 29 juin 2017 - 08:42

 

6a00d8345238fe69e201b8d2913e5a970c-50wiPoezibao rappelle la disparition, ce 21 juin, du poète Joseph Julien Guglielmi.
Et remercie Christian Tarting qui a choisi dans sa bibliothèque ces poèmes pour rendre hommage au poète. Poezibao rappelle quâune réunion se tiendra demain vendredi 30 juin à 15h30 à la Coupole du cimetière du Père Lachaise à Paris.  Entrée située au 71 rue des Rondeaux 75020 Paris.



wu

Vous regardez le monde⦠Câest un arbre dans le soleil, la ville luisante de pluie, des silhouettes, des ombres qui passent⦠des images, des bruitsâ¦
Vous vous mettez à écrire⦠Comme un vertige, alors, vous saisit devant la page blanche⦠En effet, les mots ne sont pas les choses et les lignes de la poésie déforment lâimpression première... Que vous le vouliez ou non, dans la mise en mots, le monde change.
Ce qui a été tenté ici, câest de montrer ce passage de lâimpression à lâexpression. Et pourquoi la référence chinoise ? Parce que dans cette langue, depuis toujours, les poètes, à partir dâune vue directe du réel, à partir de constatations immédiates, opèrent comme un renversement. Les images, les sentiments les plus simples, les plus élémentaires y sont toujours à lâorigine du poème. Ici, ce sont les oiseaux qui ont quitté la montagne, là, les blancs nuages qui sâenfuient infiniment, ailleurs, câest un bateau qui vogue vers une île⦠la brume du matinâ¦
Mais il y a toujours quelque chose qui survient dans le cours du poème et le sauve de la banalité, le détourne de la plate reproduction. Quelque chose comme un sentiment dâéveil à une autre dimension de lâécrit, comme lâapparition dâun signe plus fort, parfois même insolite : la lune est suspendue comme une épingle à cheveux, lit-on, par exemple, dans un morceau du xe siècle !
Ce qui est tenté ici, câest de montrer cette rupture dans le langage, cet éveil (wu) à une autre forme expressive à partir du quotidien, cette brisure du sceau du familier dont parle Bertolt Brechtâ¦
Le livre double en ses lignes brisées ne renferme rien que le surgissement de cette différence avec la langue de tous les jours, cette différence se joue, peut-être, la poésie ?

*

                matin
                ou crépuscule
                et  lâarbre  à  plumes
                                                  illuminé

*

câest  blanc
et  vide
                  avec
    un  écueil
                  blanc

*

          vent
               léger
à  dos  dâoiseau ;
                         sa  forme
dans  le  contour
                        des  branches

*

le  voyage
               est  ici
au  bas  de  la  page
                          transparent

*

          le  profil
du  je
               innombrable


Joseph-Julien Guglielmi, LâÉveilWu suivi de Lignes â), Paris, Les Éditeurs français réunis, coll. âPetite Sirèneâ, 1977, pp. 9-10, 13, 14, 20, 23, 31.


6a00d8345238fe69e201b7c906ee1f970b-50wi***




winter dance

avec ce soleil est comme du sel
je nâécris que ce que je ressens
en vérité ce que je lis :
toute célébration est destruction
ou prairie mentale
ô !
Là où la montagne du ciel
commence toujours plus
loin et couve-la de feuilles
et que jâen sois heureux moi
signe vertical verbeux et la plage
bleue bleue déserte bleue
avec le rire peut-être du jour

*

Chemin dâhiver
lâamour a les mêmes lèvres
Portail différent
Bondissent sans un mot
avec le fard des yeux
la force dâune syllabe
la peau et le froid
et que câest le printemps, lâavant
sommeil que câen est terrible
comme la maladie ou vie
les plaies ouvertes
Souvenez-vous, nous écrivons
de par lâimage du fleuve
lâeau comme draps
ou femme seule son ombre bougée


Joseph-Julien Guglielmi, Winter Dance, Paris, Portail, 1984, n. p.


6a00d8345238fe69e201bb09aa1f0d970d-50wi***




das, la mort

Poids sauvage du souvenir
à vous qui attendez sur votre
ventre ce hiver de viande,
cet hiver la viande sera
bleue la mer et grecque la
lâîle, parole croisée sur
Le feu, la clef dont les pleurs,
ainsi les foules attendent
Lâhiver, lâhiver limonaire
la découpe versillante
où il nây a plus de maison,
Légère, basse à la nuit.
Lâhumide saison des plantes,
lâignorant one so nice song
Tantôt rouge et tantôt verte
Che unâanima malviva
stessa nel suo diapason,
Trouve modus moriendi,
Au point où tu abandonnes
cet astre fait pour mémoire
Une écaille indifférente,
sauf une parole incante.
Comme dâun trait noir debout
et cela ne pense pas.
Giroux : un LIEU est ici
ici et je ne suis pas là :
Je ne parle pas je parle.
Oublier toute naissance
le
        vers maintient LA DÉCHIRURE
oui la maison au fur du ciel,
Dehors, les murs imités
que ce fut lâÅuvre du hasard
du poëte-procuration
du poëte-délégation
La procura, la delega
celui qui nâa jamais choisi ;
Never choisi entre deux vies.
Choisi le rythme avant la phrase,
le silence et la solitude,
Lâécoute longtemps sans répondre.
Sucer le son avant le mot,
Jamais de plan
                      écrire avant
de mettre à nu le modèleux,
accueillir les répétitions.
Und la trouvaille ist poésie,
Acrobatie de la syllepse,
poésie
          naît de lâhypallage
comme dâ
                une larme nubienne

*

Sans parler dâidentité
ô ciel fenêtre de plâtre,
Tu sembles venir du monde
que jâai doucement rêvé.
Un matin de ruines joie,
Rose tuerait ses pétales
allumée par la distance,
la noire forêt des mots
laisse passer sa lumière

*

Un dimanche et en octobre,
son désespoir confortable,
la bouche avec le prépuce,
hiatus ou trou de mémoire,
repos sur le dos de cochon
mangeant la jambe-culotte
She is laying on piggy back
knickerleg like money spiders :
citizen suçant la chance,
à voix basse jour et nuit :
Das, Mort au pied dâécriture,
la bale que chasse le vent

*

Déjà, vivre est une mort
Et la mort une autre vie


Joseph-Julien Guglielmi, Das, la mort, Marseille, Parenthèses, coll âChemin de rondeâ, 1987, pp. 11-12, 24, 61, 62.


***


the arrows of desire

Et toi
beauté bariolée
pied beauty
tu suivras
la poitrine nue
le dernier frisson dâun
Hopkins
ou la démesure hantée dâun
Blake
lâenchanteur
au trou de bête bariolé

Et
sois adorée
parmi les hommes
sois adorée

*

mort
inachevée
filling the brain
par
les espaces trompeurs et abstraits

quand la mythologie
multipliée
pliée par le désir
sâeffondre

rassemble
la mémoire
la déploie
ce qui
fait
le poème
pour découvrir vos membres

ainsi que les images
nâont pas besoin
de lumière
car
elles sont
lumière

*

Ici où le silence
sâassocie au plaisir
silence sky
on whose deep nakedness
death most believes
perpetual lovers marching to love
whose
bodies
kiss us
with the act
of life

ârien nâest inter   ditâ
pensait-il
ârien nâest vraiâ

Sperme fait
chair
dans
la suite
inco
hérente

fait mémoire
ôtant
le souvenir
au souvenir


Joseph-Julien Guglielmi, The Arrows of Desire, Gérardmer, coll."Voix de chants", Æncrages & Co, 2004, n. p. (Dessins de Robert Groborne.)

Photos ©François Figlarz, transmises à Poezibao par la famille de Joseph-Julien Guglielmi.
Choix des textes Christian Tarting.

 

 

wZqtKaMc788

Voir l'article complet