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(Carte blanche) à Claude Minière : "Poétique de Descartes"


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Posté 26 juillet 2017 - 09:17

 

Poétique de Descartes

6a00d8345238fe69e201bb09b2a6ba970d-50wiRelire Descartes est passionnant.  Il ne fait pas que décrire les phénomènes et formuler des règles, il invente des images et des syntaxes.  Le lire aujourdâhui, câest percer le mur dâindifférence qui désormais massivement lâentoure.

Il écrit des rêves, des centaines de lettres, des traités (dont plusieurs resteront inachevés).  Parfois, le titre porté par lâun de ces traités est étrange, « nâayant aucun rapport avec sa matière » comme le notera son biographe, Adrien Baillet. Il prévient souvent son lecteur : lâouvrage est à lire comme une fable ou comme un roman.  Pour son Traité du Monde, qui ne sera imprimé que quatorze ans après la mort de lâauteur, en 1664, il annonce : « jâai employé de lâombre aussi bien que des couleurs claires ».

Câest Herman Melville qui mâa remis sur la piste de Descartes.  Dans Moby Dick, un jeune marin rêveur, « panthéiste » (sic), se voit rappeler à lâordre (à sa tâche pratique) par un compagnon plus vigilant : « While this dream is on ye, move your foot or hand an inch ; slip your hold at all ; and your identity comes back in horror.  Over Descartian vortices you hover », Le rêve tâenveloppe, mais bouge seulement un peu ton pied ou la main, lâche à peine ta prise, et dans lâhorreur tu reviens à toi.  Tu tournes au-dessus de tourbillons cartésiens.  Des tourbillons ?  Oui, câest précisément dans le Traité du Monde, quand Descartes « explique » les lois qui gouvernent les ciels et leur sortie du chaos originel.  Alors, dans une agitation « diversement et sans ordre », le mouvement des corps « est très prompt et très violent », les atomes voltigent, tout est circulaire, les éléments légers ou lourds tournoientâ¦
Parfois le philosophe prend peur de sa hardiesse, il se montre conciliant, il dit « ne permettons pas à nôtre imagination de sâétendre si loin quâelle pourrait » , il se ressaisit : « nous avons le pouvoir de prescrire des bornes à lâaction de notre pensée ». Éprouvait-il, lui aussi, que le retour à lâidentité, à la conscience de soi, à la séparation, sâeffectue dans lâhorreur ?

En tout cas, de lâautre côté de lâAtlantique, on a donc su que René Descartes nâétait pas seulement lâhomme du « bon sens ».

Claude Minière

image : René Descartes et la reine Christine, source

 

 

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