Aller au contenu

Photo

Article sur Ravage de Barjavel (en cours)


  • Veuillez vous connecter pour répondre
5 réponses à ce sujet

#1 Alfred

Alfred

    Tlpsien +++

  • Membre
  • PipPipPipPip
  • 787 messages

Posté 28 septembre 2017 - 01:27

Bonsoir amis poètes,

Je suis tombé sur un truc facebook où un de mes amis disait qu'il était en train de lire Ravage de Barjavel.

Du coup j'ai écris un truc. Je me demandais ce que vous en pensez, voir si je peux améliorer mon post.

 

C'est un roman assez moyen, bien qu’il soit considéré dans l'histoire de la science-fiction comme un chef d’œuvre. Le fait qu’il soit considéré comme un chef d’œuvre prouve déjà la faiblesse du genre (pour lequel j’ai pourtant un profond respect, je vais y venir, quand le genre se dépasse et atteint le registre poétique). Je dis ‘moyen’, c’est pour ses faiblesses, où les personnages ne sont que des archétypes, sans profondeur psychologique. Dans la lignée des archétypes de Jules Verne, fondateur de l’anticipation française, au talent de conteur indéniable, mais encore créateur d’archétypes. Le plus fort de ces archétypes, c’est celui du Savant tout puissant, tout créateur, qui a réponse à chaque solution matérielle (beaucoup de ressemblance avec l’ingénieur, personnage principal de Ravage...). On pourrait parler de l’influence d'Auguste Comte, et de la science remplaçant la religion comme absolu, ce qui est une erreur fatale pour moi, mais qui est la trace métaphysique du roman d’anticipation français, et ici je note une différenciation avec l’esprit américain (Bradbury, Philip K. Dick, ces grands Cerfs Mystiques...).

Le grand défaut de la littérature d’anticipation est de ne présenter que des archétypes. C’est justement l’exemple du « Meilleur des mondes », meilleur bouquin d’anticipation du XXeme, pour la justesse de ses conclusions qui s’accordent, curieusement, au « 1984 » d’Orwell. Par sa présentation du monde à venir, il est évidemment très fort, très juste, et nous constatons aujourd’hui nombre de ses considérations : fascisme du désir, société de caste, développement de l’eugénisme (et d’une forme de transhumanisme, très contemporaine), recherche d’une évasion qui reste douce ( le « soma » n’est que, contemporainement, un équivalent de la légalisation du cannabis, une drogue qui nous évade, sans même une gueule de bois, du travail, sans le remettre en question, drogue qui peut même voir créer un culte, une parodie de spiritualité). A travers ça et ce personnage sauvage, qui ne trouve pas sa place dans le monde « rationnellement parfait » (le monde « rationnellement parfait » est le « meilleur des mondes » : aseptisé, froid, calculé, d’un hédonisme, pure expression égotique, la sexualité comme défouloir, la raison débarrassé de son pendant essentiel : la culpabilité) on perçoit l’incapacité d’Huxley a atteindre l’absolu littéraire, le poétique.

Il y a trois personnages essentiels dans ce « Le meilleur des mondes » : un scientifique essentiellement vertueux, un homme dont la révolte est essentiellement narcissique (c’est à dire qu’il se rebelle parce qu’il est maltraité, et sa révolte se base sur les refus sexuels qu’il a subi, et non sur une construction intellectuellement raisonné de la critique d’un système) et le sauvage. Et Huxley, justement en cela essaie dépasse le genre, pour faire de la littérature d’anticipation quelque chose d’ancré dans une tradition spirituelle. Il crée ce personnage, résolument à part, dans le « meilleur des mondes » : un sauvage élevé dans une tribu, qui a appris à lire avec Shakespeare. Soit, retrouver le monde d’avant, un monde spirituel et poétique. La seule personnalité féminine du roman est attiré par ce sauvage, différent, parce qu’il « sent la sueur ». Elle veut s’encanailler, mais comble du malheur, il en tombe amoureux. Mais non d’un amour purement sensuel, d’un amour spirituel, tel qu’on peut le retrouver dans les écrits médiévaux occidentaux (Tristan et Iseult), dans les écrits de Shakespeare (Roméo et Juliette). Ce sera son crime.

Ce sauvage, pardonne moi cette considération méta-romanesque, c’est Huxley lui-même qui se rend compte des limites qu’il a produit dans sa création littéraire. Huxley dans son roman comme s’il était dans le labyrinthe qu’il a produit, à tâter des murs sans lumière, et à reconnaître, lui-même, qu’il n’a pas la profondeur de Shakespeare. Il a déployé le maximum du genre et il n’est pas à la hauteur de Kafka, son monde de représentations n’est pas à la hauteur de celui de Balzac. Il est vrai que Bradbury a, dans les « Chroniques Martiennes » inscrit la littérature d’anticipation au patrimoine poétique, comme le souligne un très bon article de Jorge Luis Borges, l’Indépassable. Mais j’ai été attristé de Bradbury, dans une de ses nouvelles, essayant d’atteindre la grandeur de Melville et faisant appel au mythe de la Baleine (du Léviathan, le mythe de Job). J’avais l’impression d’être devant un petit écolier faisant sa dictée, trois fautes par mot, avec tout le respect, le plus grand, que j’ai pour lui.

Pour en revenir à « Ravage », débarrassé de toute ces considérations artistiques, aurait aujourd’hui le mérite de procurer de nombreuses sueurs froides à nos contemporains. Sa société finale, débarrassé, par un mouvement apocalyptique, de ses représentants médiatiques et politiques (le personnage de Jérome Seita, dans le roman), est une société revenue à un état patriarcal et technophobe. En cela il est profondément subversif et je ne pense pas qu’il puisse être « éditable » ou « primé » aujourd’hui. On pourrait même actualiser son propos final : à la fin de Ravage, un homme, Denis, s’avance vers François, le héros principal, en lui proposant le nouvel I phone X et François lui met une baffe fondamentale, comme pour lui dire que « ton progrès ne fait plus ici loi ».



#2 silver

silver

    Tlpsien ++

  • Membre
  • PipPipPip
  • 162 messages

Posté 28 septembre 2017 - 02:06

J'ai lu Ravage, il y a déjà bien longtemps, ainsi que d'autres écrits de Barjavel, tels que La nuit des temps, le voyageur imprudent, Tarendol et un recueil de nouvelles. Je m'étais passionnée pour cet auteur dont j'aimais le style et l'originalité. 

 

Pour ma part, je trouve que Ravage (et aussi La nuit des temps) ont un véritable souffle épique. Les personnages principaux sont pratiquement des hommes lambda, purs produits de la société qui les a engendrés et ce qui fait d'eux des héros ne tient donc effectivement pas à des qualités exceptionnelles en eux que viendraient révéler les événements exceptionnels auxquels ils sont confrontés, ni même à ces événements eux-mêmes, mais uniquement à l'amour fou dont ils vont aimer une femme. Le regard de Barjavel sur le genre humain (et pas seulement sur la société) est sans concession, certains diraient même pessimiste, sauf pour l'amour, même s'il semble qu'il soit toujours une exception. L'amour est en fait le véritable héro de ses romans, il en est le souffle, la flamme, la lumière révélatrice de ce qui est bon et de ce qui est mauvais, la beauté, l'enjeu, la douleur, le regret... Il y a là, à mon sens, l'essentiel de la poésie.

 

On pourrait y ajouter le côté visionnaire de Barjavel, bien que depuis, la réalité ai dépassé la fiction...



#3 Victorugueux

Victorugueux

    Tlpsien +++

  • Membre
  • PipPipPipPip
  • 19 812 messages

Posté 29 septembre 2017 - 07:53

Le monde de Barjavel c'est un monde d'une autre époque entre les années 40 et les années 60

à l'époque c'était sans tous les gadgets actuels ni ordinateurs ni téléphone portables pas de satellites etc...

les voyages lointains, ils étaient difficiles, de plus c'était encore le temps des colonies françaises

sa modernité c'était de sortir du monde d'une guerre qui a fait pas mal de dégâts aussi dans les têtes



#4 denis_h

denis_h

    Tlpsien +++

  • Membre
  • PipPipPipPip
  • 1 274 messages

Posté 29 septembre 2017 - 09:51

intéressant article alexis.

 

c'est marrant parce que on avait fait ravage et le meilleur des mondes en classe de 4ème et j'avais rien compris à l'époque.

 

dans le genre post apocalyptiqe il y a aussi maleville de robert merles. lu ça y a longtemps.

 

en fait j'avais pensé à barjavel à propos des particules de houellebecq, et ce n'était pas un compliment...

 

pour moi une référence en matière de sf :

 

51MM7C01HWL._SX290_BO1,204,203,200_.jpg



#5 Alfred

Alfred

    Tlpsien +++

  • Membre
  • PipPipPipPip
  • 787 messages

Posté 29 septembre 2017 - 11:43

hello

 

je vais retravailler l'article, je n'ai pas été assez nuancé et il faut que j'élargisse le propos, c'est le problème des trucs écrits en un jet



#6 le hamster

le hamster

    A poil laineux

  • Membre
  • PipPipPipPip
  • 2 414 messages

Posté 04 octobre 2017 - 08:28

Moi ce qui m'a toujours dérangé chez Barjavel ce sont ses fantasmes qui transpiraient, notamment ceux liés à l'inceste, qu'il mettait en scène grâce à un scenario un peu tordu (justifié par l'anticipation...)

 

J'ai toujours trouvé ça un peu malsain, voire hors sujet