J’ouvre le carnet de maroquin rouge. Je reconnais ce que j’ai écrit, à l’encre bleue, il y a quarante ans. Je mesure le poids de l’écriture, sur moi, comme une main invisible sur mon épaule. Qu’ai-je fait de cette émotion si belle, que j’exprimais là, cette émotion qui a fait trembler ma main, battre, si fort, mon cœur ?
L’histoire d’un homme s’exprime à travers celle de ses amours. Mais, s’il écrit son émotion, dans le feu de la passion qui l’entraîne, il emprisonne dans le cristal des mots ce qu’il éprouvait. Les mots deviennent, alors, des chrysalides qui attendent les regards, qui les mendient. Lire redonne vie aux mots écrits : les papillons multicolores, cloués sur la planche de l’entomologiste, reprennent vie, s’envolent, sans prévenir, vers le ciel d’été.
L’ après-midi d’octobre en fut changée.
23/10/17