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(Note de lecture) Jacques Demarcq, "Phnom Poèmes", par Jean Renaud


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Posté 16 janvier 2018 - 09:54

 

6a00d8345238fe69e201bb09e909eb970d-75wiJacques Demarcq publie, ces jours-ci, Phnom Poèmes â dont il convient, assurément, de recommander la lecture.
On peut présenter ce livre de deux façons. On commencera par celle quâimpose lâusage ordinaire (indiquer « de quoi ça parle »), quand il vaudrait mieux, pourtant, commencer par lâautre.
On dira donc, dâabord, quâil sâagit dâune description de Phnom Penh. Ou, ce qui revient au même, dâune suite de promenades. Le sous-titre (indication de genre, si on veut) le souligne (avec justesse autant que par jeu) : il sâagit dâun « documentaire ». Lequel se donne comme discontinu, partiel, aigu, drôle â et sombre, puisque la misère est là et que la désigne un regard politique. Le texte mime, ou transpose, lâusage du photographe. Se succèdent des clichés (clichés verbaux auxquels, en grand nombre, se joignent de vraies photos) : les rues, les gens, les motos, les étals, les échoppes, les tamariniers, le Mékong.
Mais â voici lâautre façon â câest un écrit où sâassemblent les mots, les phrases, les vers selon des modes inattendus, bizarres, gais, en lesquels sâagite le sens. Poèmes, dâabord, comme indique le titre, et de natures diverses. Certains transposent de savantes traditions khmères. La plupart procèdent plus simplement de la pratique de lâalinéa, lequel partage (découpe, lance et arrête à la fois, à la manière de Reznikoff) lâénoncé prosaïque, récit ou description. À quoi sâajoutent non seulement (et classiquement) lâabsence de ponctuation et la suppression des majuscules, mais, de façon inégale, tantôt discrète tantôt insistante, faisant les pitres à nos oreilles, des rimes. Puis les mots coupés, les mots ruinés : « équipé dâun chapeau guise de casque / en savates short liquette et à lâo- / ccase contre les gaz ». Les mots-valises : après les Khmers Rouges, le pays demeuré « maolade ». Mais on insistera sur la syntaxe joyeusement malmenée, souple, qui conduit dâune phrase, dâun objet à lâautre, selon la vitesse et les ralentissements â dirait-on â des omniprésentes pétaradantes motocyclettes pétrolettes triporteurs touk-touk. Deux exemples, arrachés à la continuité du texte : « les riverains boutique nuptiale du proprio guest-house labo dâanalyses café-télé » ; « le Premier Ministre et ses Vice- sous pléthore dâombrelles / suit la cour on sâincline [â¦] »
Voyage dans la langue, la nôtre, autant que là-bas, au Cambodge.

Jean Renaud

Jacques Demarcq, Phnom Poèmes, documentaire, 2017, 200 p., 15â¬.

 

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