LA HAUTAINE
Sœur de la Seine, une matamore.
Celle-ci s'avance, une nouvelle.
Folle et hautaine sous un soleil qui penche,
Sainte croix,
Elle mène à toute allure,
Sa nef toutes voiles dehors,
Nouveau Noë, son vaisseau est un bestiaire.
Dessus les fauves, des jaguars piaulent,
Dessous les squales et leurs haleines d'abysses.
Ceinturée
D'un chapelet de mésanges, et de leurs becs qui piaillent
Éblouie née des arrières,
Nouée des latitudes
Elle rit de ce mélange .
Entends les, car je suis apôtre, moi proclamatrice :
"Haleines de requins,
Fumet suintant de leurs victimes dociles,
Lassée je m'en écarte, mon regard de victoire
Et sans pitié je noie ces ombres qui sont déjà,
Sombrantes, dépitées, dans les fosses oubliées."
Elle dit ensuite au chenal, car elle devine :
"Viendront les temps de paix
Ou nul scélérat ne boira mes fossés à moitié pleins.
Je n'abreuve pas les assoiffés.
Hors de combat, se tarissent aussitôt mes eaux mêlées "
Pendant que je m'avance, et que l'eau s'amoncelle
Je vois sa nef traversant les chenals,
Ventre nerveux, elle n'a plus de regards
Mais ses clameurs s'adressent à nos désirs
D'enfants sourds.
Car sa voix haute glisse pénétrant nos tympans scellés.
Par les vents
Embouchure, ouverture mélancolique, mais
Vents scintillants surgis (jaillis) de la mer pleine,
Dieux phosphorescents,
Dont les regards violents crispent l'ondoyante
Et ses secrets.