Mardi 17 juin 2014 / 0987
La nuit n'est jamais assez longue. Ses rêves débordent toujours. Alors, tous les matins, elle arrive en retard au travail. Aucune remontrance, ni sanction, ni mise au placard ne modifient son attitude. Elle ne changerait pour rien au monde son univers onirique, et surtout pas pour un peu plus de considération de cette administration qui a pourtant la gentillesse de la garder.
Parfois, au beau milieu d'un dossier, elle ferme les yeux. Moi qui occupe le poste juste en face du sien, je me demande si elle dort, assise bien droite sur sa chaise. Je la vois sourire, son visage en oublie d'avoir des rides. Ses cils bougent légèrement comme si une brise agitait la toile où elle se projette.
Un sadique fait tomber une règle en ferraille sur le sol. Ses yeux hagards, son air désespéré, ses lèvres soudain sèches qu'elle humidifie d'un coup de langue réflexe. Adieu le paradis et si ce n'est pas l'enfer qu'elle retrouve, ça y ressemble un peu.
Puis un jour elle est partie en retraite. Sa chaise est restée vide … Un trou béant dans mon quotidien … En partant elle avait oublié quelques lambeaux de nuit. C'est alors que j'ai commencé à faire la sieste au boulot.
