Homo erectus,
l'homme debout, étonné de son audace,
étranger à lui-même dans cette posture,
mouvement suspendu
dans un équilibre précaire,
le vertige du premier pas, corps en avant,
hésitant, prêt à basculer
comme l'arbre près de s'abattre,
la falaise près de s'effondrer,
et la tentation soudaine d'abdiquer,
de se laisser choir de tout son long,
face contre terre , d'appuyer les mains au sol,
de reprendre les habitudes de l'animal,
de la bête, de ramper à terre comme ont fait
ses ancêtres, et cela, durant des millénaires
mais un sursaut d'orgueil, de fièvre ou de folie
et la course en avant qui ne s'arrêtera plus,
dans la poursuite du gibier à travers la savane,
dans la poursuite de ses rêves, de ses chimères
jusqu'à en perdre le souffle,
jusqu'à en perdre la raison,
et, peut-être, jusqu'à se perdre lui-même
*. * *
enfant, tu as refait le chemin héroïque et fou
de tes ancêtres, par imitation ou d'instinct,
un jour, tu t'es dressé toi aussi, plus tremblant
qu'un roseau, plus pur et fragile qu'une agnelle,
tu as couru, en titubant, ivre d'espoir et d'orgueil,
et tu t'es jeté dans les bras grands ouverts
de ta mère, prêt à conquérir la vie et le monde,
au seuil d'une aventure folle, exaltante et rude,
à inventer chaque jour sans peur des faux-pas,
des reniements, des trahisons, qui te conduira
vers des sommets parfois, des gouffres souvent,
de brefs moments d'exaltation ou de détresse,
de longs entractes mornes, de mises à l'épreuve
dont tu ressortiras plus fort,
vrai homme debout, enfin