le vent de terre se lance furieusement
à l'assaut de la mer qui se cabre, résiste
et bat la côte, creuse le pied de la dune,
chassant le sable en vrac
sur les quais et la jetée
dans ce corps à corps de l'air et de l'eau,
cet immémorial combat
des éternels rivaux,
qui renaît sans cesse, au gré des saisons,
sensuel, d'une violence, d'une brutalité
dignes des premiers temps,
des matins du monde,
quand tout deux se mêlaient dans les flux,
les embruns, en une union charnelle,
dans un noir maelström, où se formait la vie,
où se pétrissait la matière brute des origines,
où se dessinaient des continents erratiques
aux rivages changeants, confus, incertains
. . . et ici, dans ce théâtre en plein air,
auprès de son cerf-volant collé au sol,
affalé comme une voile sur le pont du navire,
mais frémissant au vent,
un homme face à la mer, hésitant et pensif,
lui qui rêvait de chevaucher les déferlantes,
un des bords de son aile pourfendant l'écume,
l'autre bord effleurant les nuages et le ciel,
chauve-souris énorme près d'avaler sa proie
et dont les mâchoires se referment sur le vide,
il comprend qu'il n'a pas sa place
dans ce duel de géants, cette empoignade
propice à tant de destructions, de naufrages,
où peuvent parfois même naître ou s'engloutir
des Atlantides, des cités perdues
ou des Eldorados
dont les simples noms, dans des vieux récits
nés du spectacle de la nature, effrayant
et sublime,
ou des rêves éveillés de nos anciens,
ont longtemps enchanté nos jours,
pétrifié nos nuits