Je regarde au loi des ports le soleil mourir
Dans un dernier fracas de silence et de noir
Tout au loin les bateaux ont l'ombre du saphir
Perdus dans un égout joignant la marée noire
Je vois les voiles au vent, leur poitrine gonflée
Comme un athlète surgissant au milieu des foules
Le corps nu. Le visage des femmes excitées
Comme moi regardant les bateaux sur la houle
Ô mon amour lointain
Quand m'apporteras-tu
Ton visage et tes mains
Ton amour s'est-il tu ?
Depuis longtemps déjà
Je suis abandonné
Apporte un peu de joie
Au triste prisonnier
Je regarde le ciel au soleil de la nuit
Au loin des dimensions, les étoiles s'enlacent
Mon esprit vagabonde et près d'elles s'enfuit
Au loin parmi les cieux, en dansant, le temps passe
Et tout s'en va debout comme vont les pendus
Balancés par le vent, mangés par les corbeaux
Les bientôt morts se couchent dans leur lit, étendus
Et songent avec angoisse au futur du tombeau
Ô mon amour lointain
Quand verrais-je tes yeux
Dans le clair du matin ?
Quand donc seront nous deux ?
Je rêve de ta peau
Couchée sous le laurier
Apporte le repos
Au triste prisonnier
Je regarde les monts sous la nuit qui s'étend
Les chiens jappent en courant poursuivant le gibier
Bientôt l'on pourra voir un bel enterrement
La tête du chasseur servant de chandelier
A la bête cornue menant en tête le bal
Après la joie des danses, on mangera les chiens
Les morts sont invités. Les loups comme les chacals
Participeront à l'orgie jusqu'au matin
Ô mon amour lointain
Quand seras-tu sous moi
Forniquant sous les pins,
Criant : l'amour est roi
Je rêve de tes seins
Qui me furent nourriciers
Apporte un peu de vin
Au triste prisonnier
Je regarde la cour à travers les barreaux
Déjà la nuit descend et le matin se lève
Bientôt je pourrai voir les hommes de très haut
Le vent me balançant de ci de là, sans trêve
Fumant ma cigarette, une dernière bouffée
Cherchant la vérité sur ma vie de damné
Demain les anges noirs pourront venir manger
Les restes de la carcasse du vieux condamné
Ô mon amour si loin
De trois grands corridors
Surtout ne pense à rien
Ou pense à moi et dort
Demain je serai loin
Perdu chez les damnés
Ne suis pas le chemin
Du triste condamné