DIAMONOLOGUE
La beauté est une imposture
Crucifiant l'homme imparfait
Au grand autel de la nature
Dont il ne sait jouir des bienfaits
Tais toi imbécile et regarde
La mère allaitant son enfant
Son sein vidé sans prendre garde
Ni d'elle même ni du passant.
Tu n'est qu'un niais sans défense
Car sa mamelle ne prend soin
Que de son sang et d'un besoin
Impératif de descendance.
Tais toi imbécile et ressent
Ce don de soi, ces sentiments
Ces Ors qui coulent si tendrement
Entre la mère et son enfant.
Pour sauver son pauvre petit
Elle mettra son ventre à vendre
Tu la verras faire pis que pendre
Sitôt sa mamelle tarit.
Les cieux n'ont-ils aucun attraits
Eux qui de lumières t'habillent
Et qui par les plus nobles traits
La grâce et le bonheur soulignent
Mon doux rêveur tu me fais peine
Le ciel les dieux sont de faux maîtres
C'est pour mourir qu'ils te font naître
Et la vanité même est vaine.
Non c'est bien toi le vaniteux
Qui hors de lui rien ne conçoit
Et qui ne trouve rien de mieux
Que toujours prendre soin de soi.
Moi j'obéis à la nature
Libéré de toutes passions
Elle n'a de morale ni raisons
Que du plus fort que du plus pur.
Que peut tu bien connaître d'elle
Tant elle regorge de merveilles
Le jour la nuit elle est si belle
Pourquoi n'ouvres tu les oreilles
J'en entend bien tout les supplices
Que l'homme à la nature impose
S'il croit toujours sentir la rose
Il n'est à la terre qu'un silice
Mon pauvre ami tu es à plaindre
Sans l'amour et sans l'espoir
Tu n'as même plus rien à craindre
Plus rien à vivre, et rien à croire.
La beauté n'est rien qu'une erreur
Qu'un dieu sadique a abdiqué
Anges et démons l'ont forniqué
D'un même élan naquit l'horreur.
Ce dieu n'a-t-il en son Eden
Son paradis posé Adam
Et dans un éternel amen
Offrit une Ève a son amant.
La pomme même est un aveux
De ses trop sinistres desseins
En clouant d’Ève les deux seins
Aux tables de ses désaveux.
Qui crois-tu être à définir
Des dieux l'indiscible chemin
Quand ta vie sombre en ton désir
Où vas tu noyant ton destin?
Je suis un homme rien de plus
Je vais niant mon avenir
Mon passé n'est qu'un souvenir.
Ma foi est la vie toute nue.
De quelle vie crois-tu parler
De cette mort à petit feu
Ou sans jamais pouvoir aimer
Tu vas te contentant de peu
Elle n'a de morale en soi
Qu'en édictant ses lois cruelles
Aux lions elle offre les gazelles
Aux forts les plus petits que soi
L'homme en héritier de la vie
Bâtit un avenir plus sage
Le meilleur toujours lui survi
Et cela à travers les âges
N'oublies-tu point toutes ces guerres
Les perdants, la misère, les martyres
Les vainqueurs ne font qu'obéir
A leurs plus bas instincts grégaires.
Que de héros à leur patrie
Que d'âmes fières dans la tourmente
Que d 'amour dans le pain pétrit
Lorsque la paix se réinvente
La beauté n'est qu'un faux mirage
Telle une carotte au bâton
Les masses suivent à tâtons
Le faux apôtre et ses images.
La foi souvent fait des miracles
La foule par elle portée
Peut abattre bien des obstacles
Pour recouvrir sa liberté
Foi liberté, tristes jumelles
Sitôt les ont-ils embrassés
Qu'ils tuent sans s'en embarrasser.
Et font la chasse aux infidèles.
Au Christ roi ne peux tu croire
Son sacré cœur empli d'amour
Il mourut pour te rendre espoir
Es-tu vraiment aveugle et sourd
J'en porte sa croix sur le dos
Mais sans foi et sans espérance
Aimer est mon unique chance
Survivre l'ultime fardeau.
Et comment peux-tu bien aimer
Dénigrant des autres l'espoir
Toi même ayant abandonné
Tes sentiments pour le savoir
La beauté n'est qu'un lien fugace
Être, et ne pas être pourtant
Comme un reflet dans une glace
Cet autre moi à bout portant
Être l'étranger à moi même
Qui me sourit, me décourage
Me fait d'une larme un naufrage
D'un simple baiser un poème.
N'être en soi qu'une déchirure
Tout en question mais sans réponse
Toujours au fond la meurtrissure
Qui pardonne autant qu'elle dénonce
N'être plus que ce clown en pleur
Donnant chaque jour une fête
Cependant que le cœur, la tête
Au cirque sont des gladiateurs
Mon autre moi, mon pauvre frère
Enchaînés tout deux à la vie
Comme une étoile et une pierre
Qui nous opposent et qu'elle unit
Que de douleur, de déchirures
Pour quelques mots en partage
Idées finissant en carnage
Et les reniements en blessures
Cette âme que je cherche en lui
Cet autre moi qui me partage
La raison qui nous désunit
Sont de la pensée l'apanage.
La beauté naît de cette énigme
Être multiple et n'être qu'un
Ce paradoxe plus qu'aucun
Du nom d'homme est le paradigme
Moi et moi enfin réunis
Pour le meilleur et dans le pire,
Combattant la schizophrénie,
Au désespoir offrons un rire.
Je sais c'est un peu long!! Merci à ceux qui en sont venus à bout.