Aller au contenu

Photo

(Note de lecture), Laurine Rousselet, ruine balance, par Alexandre Ponsart


  • Veuillez vous connecter pour répondre
Aucune réponse à ce sujet

#1 tim

tim

    Administrateur

  • Administrateur principal
  • PipPipPipPip
  • 5 689 messages

Posté 10 juillet 2019 - 09:36

 

6a00d8345238fe69e20240a46dbdb3200c-100wiRuine balance forme avec Nuit témoin (2016) et Journal de lâattente (2013) une très belle trilogie. Ces trois livres sont publiés aux éditions isabelle sauvage avec à chaque fois une couverture qui accompagne lâécriture et donne une idée de ce qui va suivre. Ici, elle est de couleur sombre avec un léger reflet de bordeaux témoignant que lâobscurité nâest jamais totalement monochrome. La nuit comporte ses nuances et les ruines ne sont jamais identiques. La poésie est là ; Laurine Rousselet sâen saisit pour décrire lâindicible, lâinexprimable des moments qui marquent une vie et changent les hommes. Converser traverser les noms / la langue ébranle la connaissance / lâaube se distingue de lâinfini / échapper tombe de la perdition / saisir la couleur / courir violemment.

Ruine balance
est le témoin dâune vie quâil faut vivre intensément car éphémère. lâintensité explose aux flancs / sur ta peau des lettres de passage / accidents   ailes   foudroiements /  ruine balance. Et parce que nous sommes des êtres de chair la notion de plaisir â charnel â est présente. Les corps se rencontrent et sâenlacent pour ne faire quâun : désir sans encombre / le sexe imprime / les lèvres appuient la parole assise / couvrir le noir brasser la fièvre / sans délai jouir tranche avec la peur. Cette tension érotico-sensuelle donne naissance à une écriture mouvante qui elle-même cherche le plaisir. Le verbe devient carné ; écrire dans lâautre langue (â¦) dans le bouillonnement du crire (â¦) le sexe son excentricité jusque dans la gorge / les sauts de ligne à lâassaut de la pénétration / des lèvres la souillure imprime. La phrase devient vivante, autonome et recherche un partenaire pour se perdre en lui et se laisser aller. Car écrire signifie disparaître / se perdre dans le vague.

Le poème est la scène où se déroule cette magnifique alchimie des corps, des mots. Au fond, on retrouve lâocéan, la Bretagne. Qui mieux que lâocéan peut accompagner avec autant de vigueur cette ruine balance. Balancement des vagues, balancement des corps car lâocéan est survolté pointe Saint-Mathieu (â¦) La rade de Brest se défigure et de grandes étoiles sâemploient à redescendre lâhébé Ouessant bleu vers le phare.

Une fois la lecture terminée, il me vient à lâesprit une phrase de Marguerite Duras : « Câest ça lâécriture. Câest le train de lâécrit qui passe par votre corps. Le traverse. Câest de là quâon part pour parler de ces émotions difficiles à dire, si étrangères et qui néanmoins, tout à coup, sâemparent de vous. »

Alexandre Ponsart


Laurine Rousselet, ruine balance, isabelle sauvage, 2019, 118 pages, 17 euros. Sur le site de lâéditeur, feuilleter les premières pages.

ivALORFWMmw

Voir l'article complet