Mes sens voguent en dérive et ma folie s'accroît
Les nerfs ont des hoquets comme si j'avais bu
Mon corps souvent en transes me fait un mal de chien
Mon esprit part en vol et ne connaît plus rien
Sinon que la douleur qui prend vite le dessus
Mon mal a des idées à me clouer en croix
Et moi aveugle, suis, comme une feuille au vent
Je papillonne ici et je m'écrase là
Je suis les chemins troubles où mon esprit me mène
Et je me perds partout et partout je me traîne
En voulant tout changer et arrêter le glas
Qui sonne et qui « resonne », me battant les tympans
J'ai ouï la voix des dieux mais n'ait rien entendu
J'ai suivi l'homme honnête au fin fond des enfers
Et la peur m'a glacé, et le feu m'a brûlé
Mais je n'ai point de marque sinon un front ridé
Et des yeux qui s'allument dans les nuits de la bière
Les fûts gisent vidés – Les aurais-je donc bus ?
Non ! Ne me criez plus vos paroles insolentes
Je n'obéirai plus quoique vous me disiez
Laissez-moi reposer au fin fond de ma tombe
Je ne tournerai plus dans votre ignoble ronde
Je ne veux plus sur moi que vous vous entraîniez
Cherchez une autre cible et laissez moi mon ventre
Je reprends désormais mon vent de liberté
Mes deux bras sont armés de douleur et de haine
Ne vous y frottez pas : vous briseriez vos reins
A vouloir que je suive votre imbécile chemin
Je ne peux de mes mains briser en deux un chêne
Mais vous briser les reins n'est point difficulté
Je sais l'astre et l'aurore qui réchauffent les cœurs
Et je sais les eaux bleues où mon corps a nagé
J'ai appris la nature et admiré les loups
J'ai appris à souffrir et à rendre les coups
Je sais les étés chauds, les hivers enneigés
Et j'ai appris la mort et de vous n'ai plus peur