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(Echos) Siegfried Plümper-Hüttenbrink, Annotations & Citations, 4, "Autour de la neige"


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Posté 12 mars 2020 - 04:47

 

Annotations & Citations (4)
Autour de la neige.

6a00d8345238fe69e2025d9b3bbcb8200c-300wi©siegfried Plümper-Hüttenbrink

* Florence Trocmé note dans son Flotoir quâen 1784 Denis Pierre Jean Papillon de la Ferté publie ses leçons élémentaires de mathématiques, dans lesquelles il donne la définition dâun flocon de neige ; quâen 1807, lors de son voyage dans les régions polaires, lâexplorateur William Scoresby étudie les flocons de neige et en réalise de nombreux dessins ; que par la suite la photographie sâassocie à la science pour mieux comprendre la structure de la neige ; quâà la fin du 19ème siècle, Wilson Bentley se spécialise dans la photographie des flocons et réalise plusieurs milliers de prises grâce à la photomicrographie.

* Avant quâun mathématicien, un explorateur et un photographe nâaillent traquer ces épines de cristal, Johannes Kepler, physicien-géomètre allemand, connu pour sâêtre penché sur la forme magique de lâoctaèdre, dut écrire un bref traité portant sur la structure hexagonale des flocons de neige. Il le rédigea en latin et sous les auspices dâune lettre dument envoyée à son mécène. En amorce de sa lettre il prévient dâemblée son destinataire quâil nâa rien à lui proposer, et quâhormis ce ârienâ, rien ne lui vient à lâesprit. Un rien dont personne ne sâavise du reste, vu quâil nâa pas lieu dâêtre signalé. Mais à y regarder dâun peu plus près ce soi-disant ârienâ nâest pas sans se nicher en toutes sortes dâinfimes incongruités. Telles ces vétilles microscopiques que sont le grain de sable, lâétincelle, ou la particule dâatome. Et parmi tous ces riens qui ont vite fait de sâévanouir, il en est un que J. Kepler retient sous la forme dâune myriade de flocons neigeux lui tombant du ciel et étoilant son manteau. Suite à quoi, il se lance dans une investigation cristallographique, allant détecter dans la structure hexagonale dâun flocon de neige une substance diamantine, voire stellaire. En fin de lettre, il prend encore la précaution de rappeler à son destinataire quâil nâa livré à son attention rien de moins quâun rien plus que volatil et de bien peu de poids.

* Flocon. Grain hivernal. Épine de cristal. Poudre roulée en boule dâouate. Motte ou île flottante. Mousse hilarante et qui fait mystère et boule de gomme sur lâentour de toutes choses. Tant et si bien que tout couve et cogite sous une housse de mousse blanche. La neige fait plus que blanchir le décor, elle lâannule. À vue dâÅil, les choses deviennent à peine nommables et semblent perdre de leur évidence scénique. Sculptures laissées en blanc, elles se mettent même à tomber hors de leur nom de choses en âchoses sans nomâ. Chose chue pour lors sous neige⦠Elle a beau être là, on ne voit plus soudain comment la dire. On ne peut que la laisser en blanc, soustraite à son entour, et comme en deuil dâelle-même. Nâest-ce pas dâailleurs à cette intention quâon laisse dâordinaire une chose en blanc ? En vue de la voir ne pas être là ou faire défaut. Comme si lâombre blanche dâune nuée planait sur tout le décor. Car on ne sait jamais avec la neige où elle va tomber et se résoudre à tenir. Elle nâest là quâà titre provisoire, nâétant quâun support tendu à vide. Et un rien lâentache, la creuvasse, la fait se vautrer en boue. Elle fond comme nuage au soleil.

* Au mot de neige, le Littré relève lâexpression être de neige pour dire que lâon est sans valeur et même digne de mépris. Ainsi en irait-il du bonhomme de neige. Sa réputation de bonhommie nâest bonne à rien.

Bien que présentant des affinités cristallines avec le sel, on nâa jamais vu dire de la neige quâelle soit salée, dâautant que le sel la fait disparaître. Encore quâune tournure proverbiale* en allemand semble le confirmer. Elle dit que âla neige dâhier sâavère parfois le sel dâaujourdâhuiâ.

Tout en déambulant en pleine neige, elle a vite fait de prendre des relents de moyen-âge. Elle peut même vous monter au nez, au point quâune sorte de sourire dâidiot vous reste collé en plein visage et dont on a du mal à se défaire. À ce sourire extasié, presque hilare, il nây a guère dâexplication, sinon quâil peut finir en fou rire chez les enfants.

* Ce devait être en hiver, avec un ciel couvant neige. Un jour les murs de la chambre, où jâavais coutume de me retrouver pour écrire, prirent la teinte du ciel. Comme si une mise à jour sâétait effectuée en intérieur et à ciel ouvert. Était-ce dû à un simple phénomène de réverbération ou à quelque nuée neigeuse qui conspirait en fond dâair ?
Ernst Bloch parle du même phénomène dans un fragment de son livre intitulé Traces. Une trouée de lumière sâentrouvre, et que le terme allemand de Lichtung restitue tout autant par une clairière en pleine forêt quâune éclaircie en plein ciel, sauf quâelle eut lieu à lâintérieur dâune chambre.

©Siegfried Plümper-Hüttenbrink

* La tournure allemande est "Der Schnee von gestern ist der Salz von heute ", liée avec la coutume de semer du sel par temps de neige. Mais, à vrai dire, j'ai dû l'inventer pour la circonstance, et à défaut de voir apparaître quelque chose comme de la neige par les temps qui courent. Elle existe toutefois dans la langue courante sous une forme abrégée, lorsquâon dit d'une chose "Es ist Schnee von gestern", pour signifier qu'elle est devenue obsolète et n'est plus d'actualité.


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