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(Note de lecture) William Cliff, Le Temps suivi de Notre-Dame, par Alexandre Ponsart


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Posté 07 septembre 2020 - 09:00

 

6a00d8345238fe69e20263e9631d84200b-100wiCouverture blanche et bleue avec pour titre principal « Le temps ». Câest « le temps » qui sert de conducteur pour nous mener dans le temps de lâauteur et de sa vision du temps. Dâailleurs, il cite en exergue le rondeau 99 de Froissart : « on doit le temps ensi prendre quâil vient (â¦) un temps se piert et puis lâautre revient. » Comme un écho à la période de confinement que nous avons vécu ; il ne sâagit pas de courir après le temps pour faire toujours plus car « je me conforte à ce quâil me souvient que tous les mois avons nouvelle lune. »

Lâauteur retrace ses souvenirs et nous invite à partager un temps de sa vie. Tout commence avec « Un pied-à-terre » : jâavais visité avec grand dégoût des choses (â¦) et dégoûté de ces quartiers trop convenables, jâétais redescendu aux venelles du centre (â¦) jâavais vu sur la porte âQuartier à louerâ (â¦) en conséquence je mâinstallai âcôté courâ où deux pièces possédaient de basses fenêtres (â¦) Ce logement ne mâétait alors seulement quâun pied-à-terre. Cliff nous fait part de ses voyages comme à Dijon, à Paris ou encore à Gheel où lâon dit que les fous vivent en liberté et vont ici et là dâune façon tranquille sans quâon pense jamais à les inquiéter. Chaque voyage est le signe de rencontres, dâamitiés et dâamour. Jâavais rencontré dans un cinéma « spécial » un beau garçon, maître-nageur de son état. Après plusieurs péripéties, ce garçon arriva au Brésil, prit au goût du pays et ne le quitta plus (â¦) Cela je lâai appris de son frère qui boit et que je rencontre dans les bars à Bruxelles. Parfois le voyage est une invitation au désir : Un adolescent dont le regard gris dâacier sâarrêta sur le mien, nous ne nous dîmes rien, mais plus tard je rêvai que nous partions ensemble, que ses cuisses glacées sâoffraient à mes baisers.

Ce recueil est structuré autour de deux moments importants de sa vie puisque trois poèmes sont intitulés « le professeur » et quatre « le charbon ». On apprend â pour ceux qui en doutaient â le métier difficile dâenseignant. Jâai continué mon métier de professeur, je devais me lever très tôt le matin (â¦) pour enseigner aux autres quelque chose qui dans les années futures leur servira. Cliff récite des poèmes et décrit la réaction des élèves : les élèves doucement élevaient les regards vers mon corps en train de réciter et semblaient me prier de nâarrêter jamais de les bercer au son, au rythme répété du poème pénétrant leur corps somnolant. Avec ces poèmes « Professeur », il questionne la place de lâécole et rend hommage aux enseignants et plus particulièrement à la poésie. Les poèmes du « Charbon », eux, nous plongent dans un tout autre univers lorsquâil kotait avec son frère à Louvain. Câest le temps du manque de confort et de ressource. Ah ! vieille maison de briques toutes pourries ! (â¦) je ne pense pas que nous changions nos couchages très souvent, ni que nous nous lavions les parties.

Tous ces poèmes témoignent dâune force de vivre y compris lorsque la vie est difficile. Mais nous étions jeunes, nous avions lâespérance qui nous portait dans son évolution immense. Cliff espère, croit en demain et ne cesse de questionner Dieu comme en témoigne son poème « À Dieu ». Pourquoi nous avez-vous conformés de la sorte, Être Suprême à qui nous devons lâexistence ? (â¦) Je voudrais bien savoir pourquoi ces hommes viennent si nombreux dans ma rue ainsi se promener ? Puis, le dernier poème « Requiem » achève ce voyage dans le temps : tu es une bougie, tu es un signe, la trace sur la page sans défaut (â¦) où est le vin quâon boit pour le prodige (â¦) et voici une main gantée de blanc (â¦) disparu de la terre, je voudrais peut-être te célébrer sans reconnaître pourtant la misère qui tâa fait dévoyer sur ton erre et nâêtre plus quâune vision éthérée que jâai fixée dans la photographie.

Le livre se termine par un hommage à Notre-Dame, datant de 1996, que lâauteur affectionne particulièrement car elle se tient ferme et tranquille au milieu des ravages, des pollutions, des sirènes qui hurlent (â¦) Ô Notre-Dame si indifférente à tout ce que le siècle peut vomir, prends en pitié mon âme dont la fente sâen vient saigner aux pieds de ton empire. Comme le disait Jacques Brel : « il y a deux sortes de temps : le temps qui attend et le temps qui espère ». Et câest, ici, de ce dernier temps quâil sâagit.


Alexandre Ponsart

William Cliff, Le temps suivi de Notre-Dame, La Table Ronde, 2020, 128 pages, 15 euros par Alexandre Ponsart


Extrait :
« la âmatièreâ nâest pas le tout dâun cours, il y a aussi la âmanièreâ, certes, jâai eu des moments où dans mon discours quelque chose devait mettre en alerte, câétait imprévu et cela sortait parce que cela nâétait pas prévu et donc entrait pour cette raison très en avant dans un cÅur non prévenu, lâadolescent se souviendra longtemps dâune trace qui est entré en lui et qui a fait fleurir un important écho quâil écoute encore aujourdâhui, peut-être ainsi lui était-il arrivé de recevoir Dieu sait quelle chose qui depuis lors est restée ainsi rivée dans son âme où elle sâest enclose. »




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