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(Anthologie permanente), Renshi trilingue, par Jean-René Lassalle


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Posté 09 septembre 2020 - 08:24


Renshi trilingue
(Shuntaro Tanikawa, Kim Hyesoon, Ming Di, Yasuhiro Yatsumoto)
Traduit par Jean-René Lassalle à partir de traductions anglaises et des originaux japonais, coréen, chinois

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III : Soleil


25
Du Japon le drapeau national se nomme Hinomaru (disque solaire)
Ce « Noble Dessin » nâest quâun cercle pourpre sur fond blanc
Si innocent quâil aurait pu être conçu par un enfant
mais ses couleurs sont plus retorses que celles des 5 anneaux olympiques
Jamais je ne brandirai le drapeau

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(Shuntaro)


26
Ce fut le jour du festival du soleil dans Sacsayhuaman à Cuzco
Dans le matin du solstice dâhiver je dis salut à la nuit de Séoul en son solstice dâété
La ligne de départ du marathon des 365 jours foisonnait dâAmérindiens

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(Hyesoon)


27
Les voix chantantes des pèlerins péruviens
sâentremêlent aux Jingle Bells dâune confiserie
Un homme sâenveloppe des 5 journaux nationaux
et sâallonge dans une trouée entre les bâtiments alignés⦠sachant
que ce point recevra le premier rai du soleil matinal (Asahi)

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(Yasuhiro)


28
Aux jungles dâAmérique Latine se lève un lion balançant chevelure dâor
Lorca tombant en Espagne, avant de clore ses yeux, contempla le soleil dâor (æ¥)
Il saisit un rayon comme sâil guidait un immémorial cerf-volant de paix

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(Mindy)


29
Quelle douleur apporte la lumière au hibou ?
Quelle douleur offre la lumière à la chauve-souris ?
Quelle douleur cause la lumière à la fille cachée au grenier ?
Dehors une armée de feu marche vers moi en crinière dâor
Quelle angoisse mâemplit quand je mâaccroche à la tardive étoile du matin

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(Hyesoon)


30
Lâarc-en-ciel capté sur lâécran, dâun clic perd ses couleurs
« La photographie exige-t-elle coloration quand ombre et lumière suffisent »
souffle lâopératrice aux cheveux dâargent à sa jeune assistante

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(Shuntaro)


31
Quand le monde était dans sa jeunesse Nuwa donna naissance à dix soleils,
dix soleils dix couleurs dix sexes
Ils jouèrent dans les airs en seigneurs de la guerre et brûlèrent les oiseaux
Une fille-garçon tenant un arc et dix flèches
perça neuf des soleils les éclatant en neuf mers et neuf volcans

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(Mindy)


32
Sur le cadran solaire rampe la fourmi
Du jour jusquâà la nuit elle traîne lâaile dâun papillon
Régal pour les enfants souterrains

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(Yasuhiro)


33
À lâécole de langue des signes en place dâune cloche sonne une lumière
À la fin du cours ainsi quâau déjeuner sonne une lumière
Un arbitre de football bondit et poliment forme le geste pour faute
Quand il regarde sa montre et lève son drapeau signifiant fin de partie
lâéquipe gagnante et la perdante, juges et spectateurs miment à deux mains des papillons
et les élèvent à sâenvoler vers le soleil

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(Hyesoon)


34
Nâimporte quelle scène vue dans un cadre de fenêtre paraît poétique
réfléchit le tyran terminant lâécriture de son discours
Une houle de lunettes scintille dans lâocéan de ceux qui le haïssent

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(Yasuhiro)


35
À travers son monocle mon oncle pourchasse un vase chinois
Masquée de rondelles de concombre je le traque à travers des trous dâépingle croqués par des insectes
distinguant un tournesol indiquant le soleil qui me conduit pourtant au fleuve Yang-Tsé
où Qu Yuan jadis sauta, mais je le gratifiai de feuilles de bambou fourrées de riz gluant
lors il se releva les yeux brillants, Vénus dans le gauche, un lotus dans le droit

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(Mindy)


36
Livré au vent du temps et embrasé dâantiques lumières
notre mandala résiste en poésie contre lâentropie du monde
Le soleil matinal ici est lâastre du soir là-bas, le bonjour et lâadieu sâélèvent en spirale vers le lendemain

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(Shuntaro)



Source : Shuntaro Tanikawa, Kim Hyesoon, Ming Di, Yasuhiro Yotsumoto : Trilingual Renshi, poetryinternational.org, Rotterdam 2015.. Traduit par Jean-René Lassalle à partir de traductions anglaises et des originaux japonais, coréen, chinois


Renshi trilingue
Actualisant la tradition japonaise de la chaîne humaine de poèmes qui se répondent Renga ou Renku (selon ses structures à base de tanka ou de haïku) le poète contemporain Makoto Ooka initia le Renshi dans les années 70, le libérant des mètres traditionnels, et lâouvrant aux poètes de langues différentes, en une ronde traversant les frontières. Lâinteraction est souvent intense entre les poètes et leurs traducteurs réunis pendant plusieurs jours. Le but du renshi nâest, selon Ooka, ni la perfection ni la splendeur, mais un « ouvrage réalisé à plusieurs auteurs » « constamment affecté par les interactions dynamiques et organiques entre les parties et le tout ». Le renshi japonais se nourrit de lâécoute accueillante de lâautre, de la métamorphose des métaphores, et de la création collective. Lorsquâil est multilingue, il devient une de ces Åuvres poétiques planétaires échappées de la Tour de Babel.
Le Renshi Trilingue présenté ici relia â contemporainement, par e-mail - quatre poètes asiatiques dont les pays furent séparés par le conflit mondial, et qui décidèrent de construire un mandala humaniste, pendant les quelques jours précédant le 70ème anniversaire de la fin de la guerre le 15 août 2015, ajoutant une alternative aux discours politiques prévus. Ce renshi réunit donc, sous les auspices du festival international de poésie de Rotterdam, le Japonais Shuntaro Tanikawa (né en 1931), la Coréenne Kim Hyesoon (née en 1955), la Chinoise Ming Di (alias Mindy) et le Japonais Yasuhiro Yotsumoto (né en 1959). Leur renshi se divise en 3 cycles titrés « Mer », « Riz » et « Soleil », évoquant leur environnement de vie. Le cycle complet du « Soleil », traduit ici en français pour Poezibao, décline variations et transformations du symbolisme solaire, avec échos et fils rouges entre les poèmes, pour réaliser un mandala poétique résistant « contre lâentropie du monde ».

Le Renshi entier avec ses 3 cycles dans les langues originales traduites en anglais se trouve dans les archives du site Poetry International

On peut aussi voir la vidéo des 4 poètes disant le texte dans leurs langues, avec sous-titres anglais. Si lâon avance le curseur à 9â18ââ on tombe sur le cycle « Soleil » (Sun) :

Trois remarquables livres de Kim Hyesoon sont traduits en français aux éditions Circé.

Chez Cheyne on découvrira LâIgnare, en bilingue, de Tanikawa, qui est un des poètes les plus connus du Japon.

Un essai sur le renshi en général, « Renga, Renku et Renshi », par Makoto Ooka, figure dans le numéro 100 de la revue Po&Sie (en 2002), qui offre en même temps une magnifique anthologie de poésie japonaise contemporaine avec Ooka, Tanikawa, Yoshioka, Gozo Yoshimasu, etc. On peut le lire dans les précieuses archives de cette revue, à la fin des poèmes de Ooka, pages 50-54


Jean-René Lassalle

Cette parution est également disponible au format PDF, avec illustrations, à ouvrir d'un simple clic sur ce lien.


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