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(Note de lecture), Sandra Moussempès, Cassandre à bout portant, par Anne Malaprade


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Posté 29 janvier 2021 - 10:34

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<p class="MsoNormal blockquote" style="line-height: 125%; margin-left: 40px; margin-right: 40px; text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; line-height: 125%; font-family: 'Garamond','serif';"> <a class="asset-img-link" href="https://poezibao.typ...c2c3f200b-popup" onclick="window.open( this.href, '_blank', 'width=640,height=480,scrollbars=no,resizable=no,toolbar=no,directories=no,location=no,menubar=no,status=no,left=0,top=0' ); return false" style="float: left;"><img alt="Sandra Moussempès Cassandre à bout portant" class="asset asset-image at-xid-6a00d8345238fe69e20263e98c2c3f200b img-responsive" src="https://poezibao.typepad.com/.a/6a00d8345238fe69e20263e98c2c3f200b-100wi" style="width: 100px; margin: 3px 15px 5px 5px; border: 1px solid #969696; box-shadow: 8px 8px 12px #aaa;" title="Sandra Moussempès Cassandre à bout portant" /></a>Cassandre est lâun des surnoms, avec Salomé et Messaline, que le père de lâautrice choisit pour sa fille. Câest la voix de ce prénom issu du monde tragique qui tire aujourdâhui « à bout portant ». Quelles seront ses armes, ses cibles, et peut-être ses victimes ? Les hommes, les amants, les pères, les fils, les oncles, les amis, les maîtres, les lecteurs, et leurs pendants féminins ? Notre futur à tous ? Cette Cassandre, en tout cas, porte en sa voix toute une série de personnages féminins dont ce livre va narrer, en des « phrases liquides », gestes et postures, déceptions et aventures, sacrifices et agressions. Câest comme sâil sâagissait de raconter un concept féminin à partir des figures suivantes : fillettes, jeunes filles, Barbies, majorettes, revenantes, somnambules, cantatrices, actrices, poupées, princesses, sirènes, sorcières, mères, saintes, épouses, concubines, héroïnes tragiques⦠La religion et le conte, le cinéma et les séries, la pop et la variété, les années soixante-dix et les années quatre-vingt, la tragédie antique et la poésie victorienne, fournissent des images et des stéréotypes féminins que Sandra Moussempès cite comme autant de doubles à travers lesquels elle se dévoile tout en restant dans lâombre de ses sÅurs. Si lâautrice rend hommage à une culture populaire, acidulée, pop, et souvent rose bonbon, elle ne la sépare jamais dâune culture plus savante, incarnée ici par Marie Shelley, Emily Dickinson, Virginia Woolf, Sylvia Plath ou encore Elisabeth Barrett Browning â « Il faudra lire et relire les poétesses marquées à vie par le vide/Câest le seul vers solitaire que je régurgite ici ». Ces deux mondes sont en fait bien plus proches quâon ne le croit, et fonctionnent en miroir lâun par rapport à lâautre. Le féminin et le masculin les traversent, ainsi que lâamour du jeu, du travestissement, le goût des mots et la sublimation de la surface par le reflet des apparences. Lâart majeur doit beaucoup à lâart mineur, lâart mineur se nourrit des arts dits majeurs. Sandra Moussempès montre en tout cas que cette partition gagne à être mixée et recomposée. « Il a fallu recoudre les deux miroirs ensemble/Pièce majeure de ma nouvelle garde-robe ». <br /><br />La femme nâest pas toute, disait Lacan, et câest heureux⦠Car câest depuis le manque (1) et la faille quâelle chante, invente, et met en scène des « musées imaginaires ». « Ma vie nage à côté de la réalité dans un flacon de naphtaline ». Elle fictionne en effet une vérité provenant de songes éveillés qui découpent un autre réel. Que veut la femme ?, poursuivait Lacan. Sandra Moussempès ne perce certainement pas le mystère, mais elle raconte que « ses » femmes craignent et désirent lâeffacement tout à la fois. Elles effacent et se laissent effacer, certes, mais pour mieux revenir, ressurgir, et faire réapparaître ce quâil y a dâinapaisé et dâinapaisable en elles comme en lâAutre. Restituer les traumas insaisissables (2), traquer les agressions, exposer les rapports de force et de soumission, câest peut-être ce que visent ces poèmes-scripts, qui pourtant ne sâarrêtent pas à une telle collection dâinquiétantes robes de sang. Car si on trouve des « morceaux dâhommes » dans certaines femmes, et si les mères hachent menu leurs filles devenues mères, on repère également des morceaux de femmes dans bien des hommes. Lâamour et la filiation fragmentent les identités et les êtres, comme la poésie fragmente la prose, la redistribue pour la monter sur la page. Cette dernière se coule ici dans la forme dâun verset â une ligne horizon qui suspend toute ponctuation finale, exposant ainsi une certaine logique de lâabsence et du flottement. Quelque chose sâéchappe toujours du poème, certes. Mais le poème, lui, nâéchappe jamais à sa fragile nécessité, « ligne de vie autour de mes chevilles » à partir de laquelle on avance tout en dansant. <br /><br /><strong>Anne Malaprade</strong><br /><br />Sandra Moussempès, <em>Cassandre à bout portant</em>, Flammarion, 2021, 168 p., 18 euros.<br /><br /><br /><span style="font-size: 10pt;">1. Un poème de la section « Épouses et formes de décibels » sâappelle ainsi « Auto-biographie du manque ». </span><br /><span style="font-size: 10pt;">2 « Si des jambes sans jambes se contorsionnent/Traumas friction devient table de boucher ».</span><br /><br /><br /></span></p><img src="http://feeds.feedburner.com/~r/typepad/KEpI/~4/a14pIU1BWVs" height="1" width="1" alt=""/>

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