quand elle s'endort enfin, apaisée,
sa main sur mon épaule, ayant,
pour quelques instants, oublié son mal,
je me sens promu au rang de sentinelle ,
d'ange gardien ou de dieu tutélaire,
à l'image de ces hautes falaises
qui bordent et défendent nos côtes,
et qui ont résisté aux coups de mer,
sans faiblir, au long des millénaires
mais bientôt, la pensée cruelle
de leur pied de roche tendre,
rongé insidieusement, sans relâche
par les flots, marée après marée,
de leur effondrement inéluctable,
un jour prochain peut-être,
m'assaille, me dévore, et me voilà
à mon tour terrassé par la peur,
en proie aux monstres de la nuit
moi,
pauvre sauveteur en détresse,
pauvre marin sans boussole,
naufragé parmi les naufragés,
et elle,
assiégée par la douleur,
ballotés par les mêmes eaux
amères,
nous voici confondus
dans les mêmes angoisses,
unis dans le même destin