Guillaume d'Aquilée

Je deviendrais notre partage
notre pain partagé

 

Amour si tu venais
comme un voleur dans ma nuit,

 

Et comme un feu qui distingue,
une lampe qui brûle,

 

Je dis et je dirai, amour,
au temps qui te convient :

 

Voici beauté d'enfant
qui émerveille et que j'adore !

 

Amour à cœur d'orage me fait tison,
et tisonnier je porte mon cœur

de dit en dit, d'heure en heure
et de poème, enfant, à ton visage d'or.

Et le poète danseur des mondes
Rêve la vie que la mort rêve
En un corps dément
Que mille âmes occupent
Sans qu'aucune forme un soi
Palais sans roi que des chevaux fous
Aux ailes d'oiseaux rapaces
Font hurler dans la nuit sans étoiles
Et le midi ardent qui incendie la sylve
Fleuve de feu parmi les mille lacs d'eau noire

Le rêve de la vie déjà s'écoule parmi les os
Parmi les orbites décharnées
des yeux aveugles d'avoir trop vu
Des lèvres craquées d'avoir trop bu
Les montagnes se dressent et s'écoulent
Comme vagues de pierre
Et tu n'en as rien su

 

 

Le vent entoure le vent
Le vent le vent de l'hiver

Et ta main entoure ma main
Ma main ma main sur ta mort

Ophélie vint et mourut
Et Orphée Orphée dort

Et c'est un songe des dieux
Dans la cendre d'un feu qui n'est plus.

La mort balle tes jambes nues (bis)
Et las de l'hiver (bis)
L'oiseau se tait.

Le feu dans ta chambre où seule (bis)
Tu t'abandonnas (bis)
Au vent des morts

L'hiver qui grince à la porte (bis)
En givre les cendres (bis)
Soir de janvier.

Au dehors un jeune soldat (bis)
T'apporte une rose (bis)
Entre ses dents.

Cette rose mais c'est son sang (bis)
Qui sort de ses lèvres (bis)
Craquées gelées.

Dans l'ombre solaire c'est toi :

Enfance claire et vive, une joie

Sitôt fleurie telle l'éclair meurt,

De toi une larme demeure.

 

A figure ce qui périt

Plainte sur la dune
Proche
Cathédrale dans la brume
Roche
Que balle la houle
Vague
Et sifflement de l'oiseau plongeur
Lame
Qui brisa la nef d'un peuple heureux
Presque
Ta voix encore dans le vent
Fanal
Où je trouve
Presque
Ton rire d'enfant
Dans la morte nuit
Qu'un firmament familier
Accable
Une eau morte déjà
Perce à mes pieds
La lande spongieuse
Où tout devient
Étranger

Désires-tu coeur calciné de deuil
Sentir encore le vent apporter
Le feu et l'eau de l'orage à ton oeil
La rousse feuille d'automne morte et

La plume et le cri d'un très vieil oiseau
Au vol joyeux dans l'épars de l'azur
Et que de lourdes bêtes aux naseaux
Ardents tonnent la terre en démesure

Par les mille et mille sabots pareils
Aux tambours et aux lents fleuves splendides
Cascade de muscle et de sang merveille
Assassinée par l'appétit sordide

La main avide et le pus de l'orgueil
Qui font le ciel et son peuple d'abeilles
De papillons et d'oiseaux un deuil
Que le vent de l'orage éveille

En un coeur plus seul que la mort la mort
Qui gronde et déjà dresse sa claymore ?

À peine
À pas de non
Tu passes dans la nuit
Dans ce sentier à peine
Tracé
Dans la forêt du deuil

Où l'enfant a couru
À perte de souffle
Son rire tu
Que pleure le vent
Dans les branches
Qui parfois craquent
Et tombent lourdement

Ici pourtant
Une fleur encore
Éclot

Une est la saison et une est l'année

Porte du fruit terre des morts
Poussière et sable dans les yeux des vivants
L'orgueil comme rose de sang dans les bouches d'ivoire

Une est la saison et une est l'année

Elles sont quatre les ailes du soir
Les ailes de la nuit noire dans les yeux des vivants
Elles vrombissent comme abeilles de sang dans le jasmin d'ivoire

Une est la saison et une est l'année

Porte des morts dans la nuit de lait
Poussière des morts neige des vivants
L'hiver comme caillot de sang sur la terre d'ivoire

Une est la saison et une est l'année

Elles sont quatre les portes du soir
Porte d'or et porte de sang portes des morts et des vivants
Elles claquent comme orage de sang dans les dômes d'ivoire

Une est la saison et une est l'année

Tandis qu'il s'éveille sous la douce rosée

Le lys épris d'un or très pur ouvre son cœur

Au ciel, sans méfiance pour l'ahuri bétail

Dont les sabots crottés piétinent les fragiles

Perles de l'aurore ultimes déjà qu'un pâtre

Mène à l'abattoir, tandis que nus & riants

Frêles papillons & oiseaux chanteurs superbes

Valsent dans l'azur clair comme un diamant des Indes.

Las des miracles imbéciles
Autant que du sublime inepte
Je bave au salut subsessile
Qui fait la joie des narcoleptes.

 

Dehors au dehors le dieu dort
Diadème d'or ton doux visage
L'amour t'aime sème et s'endort
Parmi de tristes paysages

 

Où l'on devine de l'amour la mort.

vers Sylvia Plath

 

 

Sois libre toujours
Je t'aimerai toujours
Toi si tellement plus belle
Que toutes mes larmes

Sylve qui pense dedans
Sa sève de mort et d'amour
Songe des blessures toutes saintes
Toutes si finalement mortelles
Ô Songe d'un corps qui se rêva
Solitaire inanité sous le soleil
Qui pourrit tes plaies odieuses

Sois libre toujours
Je t'aimerai toujours
Toi si tellement plus belle
Que toutes mes larmes

Folle feuille vole vole

Feuille folle vole au vent

Au vent mauvais des vieilles villes

Va feuille vole au vent

 

Au vent mauvais des vieilles villes

Va file feuille vole au vent

Mon étoile vaillante et pâle

Vole dans la nuit d'or

 

Fuis mon enfant la vieille ville

File vole dans la nuit d'or

Pâle étoile voile d'argent

Vole dans la nuit d'or

Folle feuille vole vole

Feuille folle vole au vent

Pâle étoile voile d'argent

Vole dans la nuit d'or

 

Au vent mauvais des vieilles villes

Va feuille vole au vent

Pâle étoile voile d'argent

Vole dans la nuit d'or

Sourd dans la nuit bleuie une valse aux accords
Doux et tristes comme une jeune et belle sainte
Et un effluve de vin doux, charmante plainte
De l'été mort où suaves s'émurent les corps.

 

Obscurs les chemins de l'âme à l'heure où l'amour
Se perd dans l'attente enfantine de l'éclair
Et le chant du rossignol dit au cœur gourd -
La nuit a ton visage telle une phalère.