Un temple ambré, le ciel bleu, des cariatides. Des bois mystérieux ; un peu plus loin, la mer... Une cariatide eut un regard amer Et dit : C'est ennuyeux de vivre en ces temps vides. La seconde tourna ses grands yeux froids, avides, Vers Lui, le bien-aimé, l'homme vivant et fier Qui, venu de Paris, peignait d'un pinceau clair Ces pierres, et ce ciel, et ces lointains limpides. Puis la troisième et la quatrième : " Comment Retirer nos cheveux de cet entablement ? Allons ! nous avons trop longtemps gardé nos poses ! " Et toutes, par les prés et les sentiers fleuris, Elles coururent vers des amants, vers Paris ; Et le temple croula parmi les lauriers roses. Conquérant J'ai balayé tout le pays En une fière cavalcade ; Partout les gens se sont soumis, Ils viennent me chanter l'aubade. Ce cérémonial est fade ; Aux murs mes ordres sont écrits. Amenez-moi (mais pas de cris) Des filles pour la rigolade. L'une sanglote, l'autre a peur, La troisième a le sein trompeur Et l'autre s'habille en insecte. Mais la plus belle ne dit rien ; Elle a le rire aérien Et ne craint pas qu'on la respecte. Charles Cros |