sangreal

…
il apprivoise les orages
de ses baisers de craie
le saxifrage
maille la caillasse
en blanche folie
…

Ecrit au sortir d’un cauchemar ce matin


Un cercueil d’azur
porté en terre

un enfant
agenouillé
dans la boue
verse une larme de jade
qu'il n' a pas pleurée

Aujourd’hui
                   Il a grandi
Il est alchimiste
Il a  brûlé ses doigts
aux braises de l’athanor


Une femme
fuyant
l’œuvre au rouge
                  se perd
et
                  se noie
au fond d’un miroir

Il se souvient lui aussi
Les yeux rougis
par la suie des icônes

« Maman, maman je me noie »
« Archange Gabriel sauve-moi »

Là, à l’horizon
Sur la mer grise
Une mouette
déchire le velours du temps

une larme éclôt
en vague d'amour

Ton coeur est un griot
aux ongles d'ivoire
Les oiseaux du Bénin, penchés
sur d'infinis miroirs
y confient
leurs légendes
de cendre et d'orchidée


Musicienne aux feuillages de reine
n'as-tu ensorcelé mes chevaux
ailés d'ébène et de poussière
n'as-tu cerclé mes songes
du secret d'hivernage
que quémande mon coeur

II
Carillonne vieux beffroi
carillonne donc à toute volée
si tu crois faire oublier
qu’un jour tu volas
ma voix
et la livras aphone
aux corbeaux
de mémoire de guerre
et de famine

Perfide musicien
jaloux à en mourir
de l’orgue et du clavecin
tu égrènes de foire en carême
ton rosaire de ritournelles

De messes en kermesses
de  bière en  prière
de gilles en bigotes
de soudards en échevins
de putains en sacristains
de noirs Jésus en vierges blanches
tu tournes
et tu  retournes
sur la mécanique du temps
des airs de dragons et de géants
des hymnes de gueux et d’éperons d’or

Mais je le sais
tu es ma musique
chant d’oubli, de mort
et de neige brabançonne
qu’abrite en son hiver
mon âme endormie
  
Carillonne donc vieux beffroi
carillonne à toute volée
rends-moi la voix
que tu  volas
renvoie-la moi
aux pieds des Alpes
que traversèrent tant de fois
vers l’Italie
les grands maîtres flamands
en quête de  beauté

III

Mon ennui, mon amour,
en barque sur l’Escaut

un nuage éventré à marée basse
écoule son sang dans l’herbe rase

griffure de lumière
blessée aux orties

les agneaux mystiques bêlent
leur blancheur d’hostie
le long des berges
en mal d’apocalypse  

d’un seul trait de pinceau
trempé au jaune d’œuf
le fleuve se pend à un vol de canards

il neige une poudre d’or
sur mon ennui
mon amour
en barque sur l’Escaut