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Ombre

    Vous voilà de nouveau près de moi
    Souvenirs de mes compagnons morts à la guerre
    L'olive du temps
    Souvenirs qui n'en faites plus qu'un
    Comme cent fourrures ne font qu'un manteau
    Comme ces milliers de blessures ne font qu'un article de journal
    Apparence impalpable et sombre qui avez pris
    La forme changeante de mon ombre
    Un Indien à l'affût pendant l'éternité
    Ombre vous rampez près de moi
    Mais vous ne m'entendez plus
    Vous ne connaîtrez plus les poèmes divins que je chante
    Tandis que moi je vous entends je vous vois encore
    Destinées
    Ombre multiple que le soleil vous garde
    Vous qui m'aimez assez pour ne jamais me quitter
    Et qui dansez au soleil sans faire de poussière
    Ombre encre du soleil
    Ecriture de ma lumière
    Caisson de regrets
    Un dieu qui s'humilie


Guillaume Apollinaire (1880 - 1918)

Poèmes de Guillaume Apollinaire