J'ai goûté sur la dune où Dante a dû passer Les couchants langoureux des pensives Zélandes ; Les clochers regardaient de la digue et des landes, Bruges, sur ton canal les bélandres glisser. Villes, vos monuments, églises et musées, Renaissent en mon âme. Ô Flandres, je revois Vos chefs-d'uvre debout, et d'eux monte une voix Qui dit : " Nous renaîtrons, nous les pierres brisées. " Qui dit : " Nous reviendrons, nous livres et tableaux Nous autels, nous joyaux, et nous L'AGNEAU MYSTIQUE, Nous Châsse de Memlinc, cet éternel cantique, Et nous ces fins d'été qui saignent dans les flots Nous renaîtrons : corons, hospices, béguinages, Beffrois et carillons, négoces opulents. Qu'importe le Malheur ! Sur les canaux dolents Comme des cygnes vont les misères des âges. Leur sillage s'efface aussitôt. Les destins Rient dans les moissons d'or et dam le sein des mères. Nous renaîtrons aussi, nous fêtes populaires, Kermesses, Carrousels. " - Ô fraîcheur des matins Tendresse des longs soirs alanguis dans les Flandres, Grands ports que chaque nuit colorent les fanaux, Je me souviens de vous, eaux vertes des canaux Où glissent lentement les pensives bélandres. L'ANÉMONE a fleuri dans le nom d'Archangel Quand les anges pleuraient d'avoir des engelures, Et le nom de Florence a soupiré conclure Les serments en vertige aux degrés de l'échelle. Des voix blanches chantant dans le nom d'Archangel Ont modulé souvent des nénies de Florence Dont les fleurs, en retour, plaquaient de lourdes transes Les plafonds et les murs qui suintent au dégel. Ô Florence ! Archangel ! L'une : baie de laurier, mais l'autre : herbe angélique, Des femmes, tour à tour, se penchent aux margelles Et comblent le puits noir de fleurs et de reliques, De reliques d'archange et de fleurs d'Archangel ! Guillaume Apollinaire(1880 - 1918) Poèmes de Guillaume Apollinaire - liste complète - liste parauteur
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