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LE VIEUX PARIS 



I- Les Deux Juifs
Vieux époux 
Vieux jaloux, 
Tirez tous 
Les verrous. 
Vieille chanson. 
Deux juifs, qui s'étaient arrêtés sous ma fenêtre, comptaient 
mystérieusement au bout de leurs doigts les heures trop lentes de la 
nuit. 


- « Avez-vous de l'argent, Rabbi? demanda le plus jeune au plus vieux. 
- Cette bourse, répondit l'autre, n'est point un grelot. » 


* * 



Mais alors une troupe de gens se rua avec vacarme des bouges du 
voisinage; et des cris éclatèrent sur mes vitraux comme les dragées 
d'une sarbacane. 



C'étaient des turlupins qui couraient joyeusement vers la place du 
Marché, d'où le vent chassait des étincelles de paille et une odeur de 
roussi. 



- « Ohé! Ohé! Lanturelu! - Ma révérence à Madame la lune! - Par ici, la 
cagoule du diable! Deux juifs dehors pendant le couvre-feu! - Assomme! 
assomme! aux juifs le jour, aux truands la nuit! 


* * 



Et les cloches fêlées carillonnaient là-haut dans les tours de 
Saint-Eustache le gothique: - « Dindon, dindon, dormez-donc, dindon! »


Aloysius Bertrand

Poèmes de Aloysius Bertrand