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II- Les Gueux de Nuit
J'endure 
Froidure 
Bien dure. 
La chanson du pauvre diable. 
- « Ohé! rangez-vous qu'on se chauffe! - Il ne te manque plus que 
d'enfourcher le foyer! Ce drôle a les jambes comme des pincettes. 


- Une heure! - Il bise dru! - Savez-vous, mes chats-huants, ce qui fait 
la lune si claire? Les cornes des c.... qu'on y brûle. 



- La rouge braise à brûler de la charbonnée! - Comme la flamme danse 
bleue sur les tisons! Ohé! quel est le ribaud qui a battu sa ribaude? 



- J'ai le nez gelé! - J'ai les grêves rôties! - Ne vois-tu rien dans le 
feu, Choupille? - Oui! une hallebarde. - Et toi, Jeanpoil? - Un oeil. 



- Place, place à M. de la Chousserie! - Vous êtes là, Monsieur le 
procureur, chaudement fourré et ganté pour l'hiver! - Oui-dà! les 
matous n'ont pas d'engelures! 



- Ah! voici messieurs du guet! - Vos bottes fument. - Et les 
tirelaines? Nous en avons tué deux d'une arquebusade; les autres se 
sont échappés à travers la rivière. » 


* * 



Et c'est ainsi que s'acoquinaient à un feu de brandon, avec des gueux 
de nuit, un procureur au parlement qui courait le guilledou, et les 
gascons du guet qui racontaient sans rire les exploits de leurs 
arquebuses détraquées.
Aloysius Bertrand

Poèmes de Aloysius Bertrand