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poeme

 

II- Scarbo
Mon Dieu, accordez-moi, à 
l'heure de ma mort, les prières d'un 
prêtre, un linceul de toile, une bière 
de sapin et un lieu sec. 
Les patenôtres de Monsieur le Maréchal. 
« Que tu meures absous ou damné, marmottait Scarbo cette nuit à mon 
oreille, tu auras pour linceul une toile d'araignée, et j'ensevelirai 
l'araignée avec toi! 


- Oh! que du moins j'aie pour linceul, lui répondais-je, les yeux 
rouges d'avoir tant pleuré, - une feuille du tremble dans laquelle me 
bercera l'haleine du lac. 



- Non! - ricanait le nain railleur, - tu serais la pâture de l'escarbot 
qui chasse, le soir, aux moucherons aveuglés par le soleil couchant! 



- Aimes-tu donc mieux, lui répliquai-je, larmoyant toujours, - aimes-tu 
donc mieux que je sois sucé d'une tarentule à trompe d'éléphant? 



- Eh bien, - ajouta-t-il, - console-toi, tu auras pour linceul les 
bandelettes tachetées d'or d'une peau de serpent, dont je 
t'emmailloterai comme une momie. 



« Et de la crypte ténébreuse de St-Bénigne, où je te coucherai debout 
contre la muraille, tu entendras à loisir les petits enfants pleurer 
dans les limbes. »

Aloysius Bertrand

Poèmes de Aloysius Bertrand