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Sagesse I - XXII

    Pourquoi triste, ô mon âme,
    Triste jusqu'à la mort,
    Quand l'effort te réclame,
    Quand le suprême effort
    Est là qui te réclame ?

    Ah, tes mains que tu tords
    Au lieu d'être à la tâche,
    Tes lèvres que tu mords
    Et leur silence lâche,
    Et tes yeux qui sont morts !

    N'as-tu pas l'espérance
    De la fidélité,
    Et, pour plus d'assurance
    Dans la sécurité,
    N'as-tu pas la souffrance ?

    Mais chasse le sommeil
    Et ce rêve qui pleure.
    Grand jour et plein soleil !
    Vois, il est plus que l'heure :
    Le ciel bruit vermeil,

    Et la lumière crue
    Découpant d'un trait noir
    Toute chose apparue
    Te montre le Devoir
    Et sa forme bourrue.

    Marche à lui vivement,
    Tu verras disparaître
    Tout aspect inclément
    De sa manière d'être,
    Avec l'éloignement.

    C'est le dépositaire
    Qui te garde un trésor
    D'amour et de mystère,
    Plus précieux que l'or,
    Plus sûr que rien sur terre :

    Les biens qu'on ne voit pas,
    Toute joie inouïe,
    Votre paix, saints combats,
    L'extase épanouie
    Et l'oubli d'ici-bas,

    Et l'oubli d'ici-bas !

Paul Verlaine

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