Ballade
Beauté vivante et éternelle,
Des mots vibrants je vais choisir
Pour célébrer l’âme charnelle
Qui porte haut l’art du plaisir,
Qui par le cœur veut vous saisir.
Beauté sans fin, beauté naissante,
Beauté qui s’offre à tout désir,
Est immanent ce qui nous hante.
A la splendeur intemporelle
Il faut des mots puissants offrir,
Mots d’une langue originelle,
Mots de mémoire et souvenir.
La langue, hélas, ne peut tenir
Face à l’oubli d’une mort lente ;
Les mots s’en vont, sans coup férir,
D’une balade insouciante.
La langue meurt en aquarelle,
Pinceau léger qui va surgir
Pour effacer à tire-d’aile
Les mots perdus qui vont pâlir.
Mort puis poussière est l’avenir
De toute langue envahissante,
De tous les mots prêts à jaillir
Comme une eau forte ou conquérante.
Beauté vibrante à ressentir,
Trop indicible, évanescente,
Laisse vers toi, les mots venir,
Morituri te salutant* !
*Ave, Cæsar, morituri te salutant ! César, ceux qui vont mourir te saluent !» Telles étaient les paroles que prononçaient, en s’inclinant devant la loge impériale, les gladiateurs qui défilaient dans le cirque, avant le combat où presque tous, en effet, devaient trouver la mort.
La beauté est vivante et elle est éternelle. Et les langues passent. C’est la poussière des morts.
Martin Eden (1909) – Jack London
Beauté vivante et éternelle,
Des mots vibrants je vais choisir
Pour célébrer l’âme charnelle
Qui porte haut l’art du plaisir,
Qui par le cœur veut vous saisir.
Beauté sans fin, beauté naissante,
Beauté qui s’offre à tout désir,
Est immanent ce qui nous hante.
A la splendeur intemporelle
Il faut des mots puissants offrir,
Mots d’une langue originelle,
Mots de mémoire et souvenir.
La langue, hélas, ne peut tenir
Face à l’oubli d’une mort lente ;
Les mots s’en vont, sans coup férir,
D’une balade insouciante.
La langue meurt en aquarelle,
Pinceau léger qui va surgir
Pour effacer à tire-d’aile
Les mots perdus qui vont pâlir.
Mort puis poussière est l’avenir
De toute langue envahissante,
De tous les mots prêts à jaillir
Comme une eau forte ou conquérante.
Beauté vibrante à ressentir,
Trop indicible, évanescente,
Laisse vers toi, les mots venir,
Morituri te salutant* !
*Ave, Cæsar, morituri te salutant ! César, ceux qui vont mourir te saluent !» Telles étaient les paroles que prononçaient, en s’inclinant devant la loge impériale, les gladiateurs qui défilaient dans le cirque, avant le combat où presque tous, en effet, devaient trouver la mort.