Plume, vous travaillez en vain 
En voulant comparer la main 
De ma dame à mortelle chose, 
Soit lis, ivoire ou blanche rose, 
Pour ce que, quand Amour prétend 
De rendre l'oeil humain content, 
Ne peut montrer objet plus digne, 
Ô main jolie, ô main divine, 
Main, qui n'as ta pareille en terre, 
Main, qui tiens la paix et la guerre, 
Main propre pour le coeur ravir, 
Et puis le contraindre à servir, 
Main portant la clef pour fermer 
Et ouvrir l'huis de bien aimer, 
Main plaisante,main délicate,
Je n'oserais te dire ingrate ; 
Tu peux blesser, tu peux guérir, 
Tu peux faire vivre et mourir, 
Main qui retiens, main qui dépars 
Main qui fends mon coeur en deux parts, 
Main pesant tout à la balance, 
Main qui soutiens plus forte lance 
Qu'Achilles (mon coeur l'a bien su), 
Car onc de main ne fut reçu 
Coup faisant si grande ouverture, 
Touchant l'amoureuse pointure, 
Que j'ai d'un seul coup soutenu 
Depuis qu'elle m'a retenu.
 
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