Quel fardeau te pèse, ô mon âme ! Sur ce vieux lit des jours par l'ennui retourné, Comme un fruit de douleurs qui pèse aux flancs de femme Impatient de naître et pleurant d'être né ? La nuit tombe, ô mon âme ! un peu de veille encore ! Ce coucher d'un soleil est d'un autre l'aurore. Vois comme avec tes sens s'écroule ta prison ! Vois comme aux premiers vents de la précoce automne Sur les bords de l'étang où le roseau frissonne, S'envole brin à brin le duvet du chardon ! Vois comme de mon front la couronne est fragile ! Vois comme cet oiseau dont le nid est la tuile Nous suit pour emporter à son frileux asile Nos cheveux blancs pareils à la toison que file La vieille femme assise au seuil de sa maison !
Dans un lointain qui fuit ma jeunesse recule, Ma sève refroidie avec lenteur circule, L'arbre quitte sa feuille et va nouer son fruit : Ne presse pas ces jours qu'un autre doigt calcule, Bénis plutôt ce Dieu qui place un crépuscule Entre les bruits du soir et la paix de la nuit ! Moi qui par des concerts saluait ta naissance, Moi qui te réveillai neuve à cette existence Avec des chants de fête et des chants d'espérance, Moi qui fis de ton coeur chanter chaque soupir, Veuxtu que, remontant ma harpe qui sommeille, Comme un David assis près d'un Saül qui veille, Je chante encor pour t'assoupir ?
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