Brésil
J’arrivai à Bahia par un soir de pleine lune
J’en vis briller l’éclat sur des peaux noires et brunes.
C’était un soir de fête ; Je ne vis que des corps
Et des milliers de têtes, qui dansaient sur le port.
Dans des glissements de chair, des formes irréelles
Sur des rythmes d’enfer frôlaient les coups mortels,
Images instantanées de ces corps embrasés.
Et ces muscles huilés, ces jambes entrelacées
Loin des Bossa nova , dansaient la Capuera.
Et puis je poursuivis ma route vers le sud
Vers des citées enfouies, vers d’autres latitudes
Dans des contrées sauvages où des forêts immenses
Laissaient dans leur feuillage passer les eaux si denses
Du fleuve d’Iguaçu ; vertes, puis rouges et blanches
Elles courraient vers le gouffre dans un bruit d’avalanche
Et des odeurs de souffre. Une musique étrange
Qui montait crescendo, émanait de ce Gange
Latino. Son grand cri finit en Boléro
Pour mourir peu à peu et s’éteindre bientôt…
J’étais dans la forêt au milieu des oiseaux
Des fauves, des perroquets, des milliers de morphos.
Je dû partir ensuite et rejoindre Rio.
Je vis une ville immense et des gens délirants
Un carnaval en transe, des hôtels indécents
De luxe, qui regardaient la pauvreté d’en face
Avec des lits de soie, des impudeurs de strass
Et cette misère là , qui nécrosait les flans
De Copacabana, sous le gros œil absent
Du Christ, perché là -haut, sur son Corcovado
Qui ouvrait grand les bras, en signe d’impuissance.
Je vis Maracana dans son incandescence
Des grand soirs de victoire, et puis ce grand bazar
Qui brûlait tous les soirs de mille petits phares.
Je vis des hommes, devenus femmes, séduire des hommes
En falsifiant leurs corps, apostasiant leur sexe
En rêves siliconés, en chimères de latex.
Cette ville m’aurait tué si je n’en étais parti
Pour finir mon voyage, je vins à Paraty
Je vis des enfants sages, je fis des rêves bleutés
Où d’étranges vaïnées me lavaient d’orchidées
Et des goélettes rousses glissaient sur les eaux vertes
Des lagons en glacis vers des criques désertes.
Je pris des bains de ciel d’une douceur infinie,
Il me fallu pourtant quitter ce paradis.